Laurent RaibautEnseignant-chercheur à l’Institut de chimie de Strasbourg (CNRS/Université de Strasbourg)
Avec son projet Curanostic, Laurent Raibaut, enseignant-chercheur à l’Institut de chimie de Strasbourg, est lauréat de l’appel à projet Emergence@INC2025. Par cet appel, CNRS Chimie accompagne des chargés de recherche ou maîtres de conférence recrutés depuis 4 à 10 ans en finançant un projet novateur et en encourageant la prise de risque.
Votre projet Curanostic vise à développer une nouvelle approche d’immunothérapie au cuivre pour le cancer. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Le cuivre est un métal essentiel pour notre organisme qui est actuellement très étudié pour ses applications diagnostiques et thérapeutiques en médecine nucléaire. Le projet Curanostic propose de développer une nouvelle génération de complexes de cuivre qui pourraient être utilisés à la fois en imagerie et radiothérapie. Cette approche théranostique repose sur la formation de complexes réversibles de cuivre couplés à un anticorps. Ces immuno-complexes pourront être utilisés comme agent diagnostique d’imagerie PET1 au 64Cu et, par la suite, en traitement de radiothérapie vectorisée en libérant du cuivre radioactif 67Cu via les voies métaboliques du cuivre dans des cellules cancéreuses. Cela permettra de maximiser le temps de résidence du cuivre radioactif au sein de la tumeur et d’augmenter ainsi son efficacité thérapeutique. À terme, le projet Curanostic prévoit la création de plusieurs versions de notre technologie « chélateur(Cu)-anticorps » en modifiant le type d’anticorps et la version du chélateur (groupement organique) qui piègera le cuivre. Ces immuno-complexes seront évalués en collaboration avec des radiochimistes pour étudier leurs propriétés biologiques lors de tests in vitro.
En quoi cette recherche est-elle émergente et à risque ?
L’utilisation du cuivre en médecine est actuellement en pleine émergence, tant pour l’imagerie médicale que pour le développement de molécules thérapeutiques qui ciblent son rôle dans le cancer. Au sein de l’Institut de chimie de Strasbourg (CNRS/Université de Strasbourg), je fais partie de l’équipe Biométaux et chimie biologique qui explore les mécanismes chimiques lié à la biologie de cuivre et ses complexes. Jusqu’ici, nous ne nous sommes jamais intéressés à ses applications en médecine nucléaire. Avec le projet Curanostic, nous souhaitons répondre simultanément aux enjeux diagnostiques et thérapeutiques du cancer avec une seule et même molécule : un immuno-complexe de cuivre. D’abord testées in vitro, les meilleures molécules candidates seront sélectionnées pour leur efficacité et spécificité puis finalement étudiées dans des conditions biologiques réelles in vivo. Nous espérons que ces recherches ouvriront la voie à de nouvelles applications en médecine nucléaire.
Quelles pourraient-en être les principales retombées ?
En explorant le développement de nouveaux chélateurs à cuivre réversibles selon la nature du milieu biologique, le projet Curanostic apportera de nouvelles connaissances fondamentales sur la chimie de coordination du cuivre en milieu biologique. Ces chélateurs seront combinés à des anticorps monoclonaux déjà approuvés cliniquement pour leur apporter de nouvelles propriétés et élargir ainsi l’éventail des stratégies d’immunothérapie disponibles. Les résultats obtenus dans le cadre de ce projet pourront servir de base à des collaborations industrielles pour explorer les potentielles applications cliniques de ces immuno-complexes de cuivre. Le soutien du projet Curanostic par le programme Emergence est une opportunité unique de générer rapidement les premiers résultats scientifiques qui donneront la visibilité nécessaire au projet pour son développement futur.
Rédacteur : AVR
- 1PET signifie Tomographie par Émission de Positons (Positron Emission Tomography), une technique d imagerie qui détecte les particules appelées positons émises par des traceurs radioactifs pour créer des images détaillées des organes et des tissus en activité