[Ils et elles ont choisi la France #2] Amanullah Sk rejoint l’Institut des sciences moléculaires de Marseille
Après un doctorat à Kolkata et des stages postdoctoraux en France et en Suisse, Amanullah Sk rejoint l'Institut des sciences moléculaires de Marseille en 2025 pour ses recherches sur la conversion catalytique des oxydes d'azote en ammoniac. Il nous en dit plus sur son parcours, ses motivations pour postuler au CNRS et ses perspectives pour les années à venir.
Pouvez-vous nous parler de votre parcours et de vos thèmes de recherche ?
Je suis originaire de Kolkata (anciennement Calcutta), une ville historique de l'est de l'Inde. J'ai obtenu une licence en chimie au Presidency College de Kolkata, puis une maîtrise en chimie à l'Indian Institute of Technology de Kharagpur. J'ai ensuite effectué un doctorat en chimie inorganique à l'Indian Association for the Cultivation of Science (IACS), à Kolkata, sous la direction du Pr. Abhishek Dey. Ma recherche doctorale visait à comprendre pourquoi la nature a évolué vers différents cofacteurs de l'hème1 et comment leurs structures influencent leur réactivité.
Après mon doctorat, je suis allé en France pour la première fois et j'ai rejoint le CEA à Paris-Saclay en tant que chercheur postdoctoral. En collaboration avec le Pr. Ally Aukauloo et le Dr. Winfried Leibl, j'ai étudié les intermédiaires impliqués dans les réactions électro- et photo-catalytiques de réduction du CO₂. Pour mon deuxième postdoctorat, j’ai déménagé en Suisse et rejoint l'École polytechnique fédérale de Zurich (ETH Zurich) en tant que boursier du Fonds national suisse de la recherche scientifique (FNS). À cette occasion, je suis passé de la catalyse homogène à la catalyse hétérogène.
J'ai ensuite rejoint l'Institut des sciences moléculaires de Marseille (iSm2 – Aix-Marseille Université/Centrale Méditerranée/CNRS) en tant que chargé de recherche CNRS en novembre 2024. Je travaille actuellement sur les oxydes d'azote, aussi connus sous le nom de NOx. Le protoxyde d'azote (N2O) et le dioxyde d'azote (NO2) font partie des polluants atmosphériques les plus répandus. Quant au nitrite (NO2-) et au nitrate (NO3-), ils sont responsables de la pollution de l’eau et de l’eutrophisation2 . Mon objectif est de développer un système catalytique pour la réduction de ces NOx en ammoniac. Mon approche, qui couple des enzymes artificielles (obtenues par évolution dirigée) et des systèmes modèles moléculaires synthétiques, fait le lien entre la catalyse biologique et la catalyse chimique.
Qu'est-ce qui a motivé votre candidature au CNRS ?
J’ai été motivé par la réputation du CNRS, une institution de recherche de premier plan au niveau mondial, dédiée à l'excellence scientifique et à l'innovation. Par ailleurs, le CNRS favorise la collaboration entre différents domaines, ce qui permet des découvertes importantes. Mon propre projet de recherche combinant des aspects de biologie et de chimie, cette approche interdisciplinaire m’a particulièrement attiré.
Pour être honnête, j'aurais hésité à approfondir mes recherches sur les NOx – malgré l’urgence de la situation, du fait de leur impact significatif sur la santé et l'environnement – sans la sécurité et les ressources qu'offre le CNRS. Cet environnement de recherche propice m'a donné la confiance nécessaire pour mener à bien ce projet ambitieux.
Comment s'est passée votre installation en France ?
J’avais passé plus d’un an à Paris quand j’étais chercheur postdoctoral. Par conséquent, j’étais déjà familier de l’environnement de travail français, collaboratif et accueillant. Tout le monde ici est très serviable et m’a aidé à naviguer facilement dans les processus administratifs, à trouver un logement et à m’installer. C’était un vrai plus, étant donné mes compétences linguistiques limitées en français. Je n'ai jamais eu l'impression d'être loin de chez moi, ce que j'attribue à la nature chaleureuse des Français.
Avez-vous encore des projets en cours avec l’Inde ?
Je poursuis un projet collaboratif sur l'oxydation électrocatalytique des liaisons C-H avec mon directeur de thèse à l'Indian Association for the Cultivation of Science, à Kolkata. Ce projet, qui devrait s'achever bientôt, est par ailleurs mené en collaboration avec un autre groupe de recherche de l'Université du Michigan, aux États-Unis. J’espère établir de nouvelles collaborations à l'avenir, notamment en m’appuyant sur mon solide réseau en Inde. Je prévois ainsi de postuler aux appels à candidature du Centre franco-indien pour la promotion de la recherche avancée (CEFIPRA), conçus pour promouvoir les réseaux de collaboration franco-indiens.
Quelles sont vos perspectives pour les années à venir ?
Dans les années à venir, je souhaite m'engager dans des recherches innovantes et des collaborations interdisciplinaires. Mon objectif est de contribuer à des projets ayant un impact sur les défis mondiaux liés au changement climatique, de publier dans des revues de qualité et d'élargir mon réseau professionnel grâce à des collaborations nationales et internationales. Je vise en particulier le programme Jeunes chercheuses et Jeunes chercheurs (JCJC) de l’Agence nationale de la recherche ainsi que la bourse ERC Starting pour financer mes travaux. En outre, je suis ouvert à l'exploration de nouvelles opportunités qui s'alignent sur mes objectifs de carrière à long terme, tant dans le monde universitaire que dans l'industrie.
Propos recueillis par CD
- 1Les cofacteurs de l hème permettent à ces protéines d assurer différentes fonctions biologiques essentielles comme le transport et le stockage de l oxygène (hémoglobine, myoglobine), le transfert d électrons dans la chaîne respiratoire (cytochromes)…
- 2L eutrophisation correspond à l accumulation des nutriments dans un milieu terrestre ou aquatique. En milieu aquatique, elle est caractérisée par une croissante excessive des plantes et des algues. Du fait de leur consommation importante de dioxygène, ces dernières provoquent l appauvrissement, voire la mort de l écosystème aquatique présent.
“Ils et elles ont choisi la France”
“Ils et elles ont choisi la France” est une série éditoriale qui vise à mettre en avant le parcours de chercheuses et chercheurs de nationalité étrangère recruté-es dans des laboratoires de CNRS Chimie en 2024.