Rapprocher le public de la science, le sésame de la médiation scientifique
Le projet SAPS « IDILIC » réunit chimistes, sociologues et animateurs de la commission « Chimie et Société » pour mieux comprendre l’impact de la médiation scientifique en chimie auprès du public. Leur dernier événement en date : une conférence interactive en visioconférence, à Nantes, qui a réuni plus de 400 lycéens.
Fédérer les actions de médiation de la chimie en France : c’est la mission de « Chimie et Société », une commission de la Fondation de la Maison de la chimie créée en 2001. Parmi ses actions phares, l’équipe organise chaque année des rencontres « Chimie et Terroir ». « Ce sont des démonstrations à destination des scolaires et du public sur des thèmes proches de la région : le pastis pour le Sud, les huîtres pour la Bretagne… » détaille Lydie Valade, directrice de recherche honoraire au CNRS et présidente de la commission. « Nous nous appuyons sur un réseau d’animateurs locaux : des chercheurs et des enseignants-chercheurs essentiellement, mais également des ingénieurs et des médiateurs scientifiques. » La dernière édition a réuni plus de 1 200 personnes en mai 2024 à Baccarat, en Meurthe-et-Moselle.
L’autre rôle de « Chimie et Société » consiste à conduire une réflexion sur la perception et la communication de la chimie. La commission est ainsi partenaire du projet IDILIC (Informer, débattre, interagir localement, sonder les idées et les connaissances). L’originalité de ce projet, lauréat d’un appel Science avec et pour la société (SAPS) de l’Agence nationale de la recherche, est de réunir trois catégories d’acteurs : chimistes, sociologues et médiateurs scientifiques. « L’objectif d’IDILIC est d’organiser des événements de médiation autour de la chimie dans différents environnements, puis d’analyser leur impact par le prisme de la sociologie », explique Arnaud Tessier, chargé de recherche au laboratoire Chimie et interdisciplinarité : synthèse, analyse, modélisation (CEISAM, CNRS/Nantes Université) et porteur du projet. Des chercheurs de Dysolab, une unité de recherche en sciences humaines et sociales de l’université de Rouen, ont ainsi élaboré une enquête auprès des participants pour évaluer leurs a priori sur la chimie et constater leur évolution après l’échange avec les scientifiques. Cette étude sociologique, en cours de finalisation, donnera ensuite lieu à une publication pour analyser l’impact de la médiation scientifique sur l’image de la chimie.
Après des événements organisés à Grenoble et à Rouen, le dernier en date : une conférence interactive à l’université de Nantes sur le thème « Tous chimiques par Nature ! ». Plus de 400 lycéens de l’académie y ont assisté en visioconférence à l’occasion de la Fête de la Science, le 10 octobre dernier. Les élèves de seconde et de première générale, technique et professionnelle, ont pu utiliser l’application Wooclap sur leur smartphone pour répondre aux questions posées par l’animateur. Pour illustrer ce point, l’image qui accompagne cet article présente la question à choix multiples « Un produit chimique est pour vous… ? », posée au début et à la fin de l’événement. La comparaison des résultats entre ces deux temporalités révèle une évolution significative dans la perception des élèves sur certains aspects de la chimie. Cet exemple de résultat constitue un premier effet de la médiation et de la « remédiation » qu’elle peut apporter, notamment sur la déconstruction d’a priori en chimie.
« Le côté distanciel peut faire peur, étant donné que les élèves sont plus timides, mais je préfère voir les avantages : les classes sont bien équipées depuis la période Covid et cela limite les frais pour les établissements trop loin de Nantes », analyse Arnaud Tessier. « Cela permet de rapprocher de la science des publics qui en sont éloignés, ne serait-ce que géographiquement, et qui sont plus réceptifs que des élèves issus de grandes villes universitaires, habitués à ce genre d’opportunités », abonde Lydie Valade. « Ce que nous transmettons, ce n’est pas la recherche à proprement parler, mais des connaissances que la recherche a permis d’acquérir. Ce qui est tout aussi important ! »
La clé du succès : s’appuyer sur le rectorat et les inspecteurs académiques, et s’adapter au calendrier proposé, souvent très en amont. En un mot, beaucoup de préparation. Un volet logistique piloté notamment par Thomas Tessier, chargé de médiation au laboratoire CEISAM. « J’ai commencé à travailler sur cet événement d’octobre dès mon recrutement en stage de Master 2, en janvier ! », indique Thomas Tessier. « Mes missions incluaient l’obtention du label ‘‘Fête de la science’’ pour la conférence, de sorte à nous assurer un maximum de classes participantes, et à coordonner les échanges avec les différents acteurs impliqués dans l’événement, qu’ils soient universitaires ou rattachés au rectorat de l’académie de Nantes. » Une collaboration indispensable et fructueuse qui a permis un beau succès pour cet événement de médiation scientifique, vivement apprécié par les enseignants et leurs élèves.
Rédacteur : CD