SurfactGreen : de la recherche fondamentale aux cosmétiques biosourcés. Trois questions à Thierry Benvegnu
Thierry Benvegnu développe des tensioactifs issus de matières premières végétales afin de remplacer les matériaux d’origine pétrolière utilisés traditionnellement par l’industrie chimique. Ceci afin de réduire l’impact environnemental de produits d’usage quotidien. En 2016, il a co-fondé l’entreprise SurfactGreen qui commercialise et développe ces alternatives vertes.
Comment êtes-vous arrivé au domaine de la chimie verte ?
Recruté à l’Ecole nationale supérieure de chimie de Rennes (ENSCR), j’ai intégré un laboratoire de l’Institut des sciences chimiques de Rennes afin de trouver des alternatives aux produits de l’industrie pétrochimique qui présentent souvent un degré de toxicité et sont peu biodégradables. Très vite, avec mon équipe, nos recherches se sont portées sur les tensioactifs couvrant une large gamme de produits comme les cosmétiques, les détergents ou les peintures. Nous voulions mettre au point des procédés respectueux de l’environnement, peu coûteux en énergie, générant le moins de déchets possible. Ces recherches ont abouti à une quinzaine de brevets. Par exemple, à partir d’un résidu de la betterave à sucre, nous avons développé des surfactants cationiques qui peuvent être utilisés dans des démêlants pour cheveux, des adoucissants pour le linge et d’autres applications. À titre personnel, j’avais le goût pour l’innovation et la valorisation et j’ai voulu porter ces travaux jusqu’à l’étape de la production industrielle.
Sur la base de ces brevets, vous avez co-fondé la société SurfactGreen, qui a reçu le prix "Environmental intelligence Agri/Agro" du Campus Innovation et de la SATT de Rennes en 2022.
Quels sont les produits que la société développe et commercialise ?
SurfactGreen est le résultat de plus de 15 ans de travaux de recherche fondamentale et de partenariats avec des industriels. En 2011, j’ai créé une « business unit » pour commencer à travailler sur des produits et des procédés industriels. Puis, le projet a évolué et en 2016, nous avec Daniel Plusquellec et Pierre-Yves Divet, nous avons créé l’entreprise avec l’aide de fonds d’investissement et d’entrepreneurs privés. Aujourd’hui, la société réalise 2,5 millions d’euros de chiffre d’affaires et compte plus de 100 clients en France et à l’international.
Notre gamme principale est celle des produits cosmétiques. Plusieurs marques ont déjà intégré nos ingrédients biosourcés dans leurs formulations commerciales. Grâce à SurfactGreen, leurs produits ont bénéficient un plus faible impact environnemental sans atténuer son efficacité. En effet, les surfactants que nous élaborons sont biodégradables et 60 fois moins écotoxiques que les références pétrosourcées du marché.
Nous développons aussi des produits pour d’autres secteurs, comme celui du bâtiment. Nous proposons par exemple des émulsifiants pour bitume, un inhibiteur de corrosion utilisé dans des plateformes pétrolières en haute-mer, ou encore, une gamme de détergents pour l’industrie automobile.µ
Quels sont les prochains défis que vous voulez relever ?
Un des défis majeurs de la chimie végétale est de trouver les matières premières. Une idée est de mettre au point des procédés chimiques directement à partir de la biomasse végétale, sans produits intermédiaires. Ceci réduirait les coûts et nous serions encore plus compétitifs. Nous aidons donc l’industrie chimique dans sa transition écologique.