Phénomènes quantiques : l’hydrodynamique généralisée validée dans un nouveau cas
La complexité des phénomènes quantiques les rend très difficiles à modéliser. La théorie de l’hydrodynamique généralisée simplifie la description des gaz quantiques unidimensionnels, mais n’a pas encore été pleinement validée. Des chercheurs du Laboratoire de physique et chimie théorique (LPCT, CNRS/Université de Lorraine) et de l’université d’État de Pennsylvanie (États-Unis) ont prouvé qu’elle fonctionnait sur des gaz unidimensionnels à interactions fortes. Publiés dans la revue Science, ces résultats révèlent donc un nouveau cas d’application de la théorie de l’hydrodynamique généralisée.
Les scientifiques qui travaillent sur des systèmes quantiques sont confrontés à un problème récurrent : il est très difficile de modéliser des phénomènes quantiques, surtout quand ils ont de nombreux degrés de liberté, sans ordinateurs quantiques. Or de telles machines sont encore bien trop rares et trop peu puissantes pour accomplir ces tâches. Dans le cas des gaz quantiques unidimensionnels, la théorie de l’hydrodynamique généralisée considère ces systèmes comme un milieu continu, sans suivre le mouvement individuel des particules. Cette idée, apparue en 2016, peut être comparée au fait de décrire le comportement de l’eau en la prenant pour un tout, et non comme la somme des molécules qui la composent, ce qui facilite grandement la modélisation. Jusqu’à présent, la validité de l’hydrodynamique généralisée n’avait été constatée que pour des gaz unidimensionnels où les atomes interagissent faiblement. Des chercheurs du Laboratoire de physique et chimie théorique (LPCT, CNRS/Université de Lorraine), ayant déjà participé aux travaux précédents, et de l’université d’État de Pennsylvanie (États-Unis) ont réalisé la première démonstration expérimentale de l’hydrodynamique généralisée pour des interactions fortes entre les atomes.
Pour cette expérience, des atomes ont été refroidis à des températures extrêmement basses par des lasers, puis piégés dans un réseau de tubes si fins qu’on ne s’y déplace que dans une seule dimension. Chacun de ces tubes parallèles est isolé des autres et contient une dizaine d’atomes, formant un gaz. Ces atomes, qui bougent et s’entrechoquent comme une série de billes coincées dans une gouttière qui n’en laisserait passer qu’une seule à la fois, ont été compressés pour que les chercheurs puissent étudier leur détente. Au lieu d’osciller de plus en plus lentement et de dégager de la chaleur pour revenir à un état d’équilibre, comme il devrait le faire selon les lois de la mécanique de Newton, le nuage de gaz a continué de vibrer selon une forme qui permet de mesurer la vitesse et la densité des atomes qui le composent. Ce comportement correspond à celui d’un système quantique et suit parfaitement aux prédictions de l’hydrodynamique généralisée. Ces résultats élargissent ainsi la palette des situations pouvant être efficacement simulées grâce à l’hydrodynamique généralisée, et éclaircissent la frontière entre les comportements classiques et quantiques.
Rédacteur : CCdM
Référence
Neel Malvania, Yicheng Zhang, Yuan Le, Jérôme Dubail, Marcos Rigol & David S. Weiss
Generalized hydrodynamics in strongly interacting 1D Bose gases
Science 2021