Vers un meilleur diagnostic par double imagerie chimique et anatomique des tissus
Une nouvelle sonde pour l’imagerie par résonnance magnétique (IRM) du fluor permet de distinguer en temps réel deux états chimiques du fer dans le corps, révélant des zones de stress oxydatif ou, au contraire, de réduction. Complémentaire à l’imagerie anatomique, ce contraste innovant ouvre la voie à une détection plus fiable et précise des maladies inflammatoires ou cancéreuses. Une avancée parue dans JACS.
L’imagerie par résonance magnétique (IRM) est un pilier du diagnostic médical. Mais si elle excelle à montrer les formes et structures internes du corps, elle peine à capter les signaux subtils de la chimie du vivant. Or, dans de nombreuses maladies, du cancer à l’inflammation, le « stress oxydatif », une perturbation de l’équilibre chimique entre formes réduites et oxydées de certaines molécules, joue un rôle majeur. Suivre cet équilibre en temps réel à l’intérieur même des tissus vivants permettrait d’ajouter de précieuses informations chimiques aux images obtenues par IRM.
Dans ce contexte, des chimistes du Centre de biophysique moléculaire (CNRS), en collaboration avec une équipe hongroise, ont mis au point un agent de contraste moléculaire original basé sur un petit composé de fer associé à un ligand fluoré, appelé FeL1. Ce composé existe sous deux formes : une forme réduite (Fe²⁺) et une oxydée (Fe³⁺). Chacune possède des propriétés très différentes en IRM au fluor-19. Cet isotope du fluor n’existant pas naturellement dans le corps humain, cette technique d’IRM permet une détection de signaux très précise et sans interférences. Selon l’état redox du tissu environnant, le complexe mis au point change de forme, et donc de signal. Grâce à des séquences IRM spécifiquement adaptées à la vitesse de relaxation du signal fluoré, les deux états du complexe – oxydé et réduit – sont facilement différenciables.
Après injection intramusculaire de ce complexe chez la souris, les scientifiques ont pu visualiser ses deux formes simultanément avec une grande sensibilité et dans un temps d’acquisition raisonnable. Qui plus est, la version oxydée du complexe offre également un contraste en IRM classique à l’hydrogène (¹H), ce qui permet une double lecture chimique et anatomique des tissus.
Avec ce système, il donc devient possible de cartographier le stress oxydatif dans les tissus vivants, un marqueur important de nombreuses pathologies. Injecter la forme réduite pourrait par exemple révéler des foyers inflammatoires riches en espèces oxydantes, tandis que la forme oxydée permettrait de détecter des tissus anormalement pauvres en oxygène, comme c’est le cas pour certaines tumeurs à croissance rapide. Ce détecteur moléculaire, encore à l’étape préclinique, pourrait donc enrichir considérablement la trousse à outils de l’imagerie médicale de demain. Une avancée parue dans la revue JACS.
Rédacteur : AVR
Référence
Relaxation-Based In Vivo Discrimination of Oxidized and Reduced States of a Redox-Switchable 19F MRI Probe
Garda, Zoltán; Szeremeta, Frederic; Tóth, Csilla; Bunda, Szilvia; Pifferi, Carlo; Clémençon, Rudy; Même, Sandra; Tircso, Gyula; Tóth, Éva
JACS 2025
https://doi.org/10.1021/jacs.5c03244
