Un tunnel moléculaire autoassemblé pour préserver l’équilibre des cellules
Processus biologique essentiel à toute vie, le transfert d’ions au travers des membranes cellulaires ne fonctionne pas toujours de manière équilibrée. Des chercheurs de l’Institut Européen des Membranes (CNRS/ENSC Montpellier/Université de Montpellier) et de Lehn Institute for Functional Materials à l’université chinoise de Sun Yat-sen à Guangzhou (Canton) ont conçu, par auto-assemblage, un véritable tunnel moléculaire pour le passage des anions, plus récalcitrants aux transferts par membrane que les cations. Publiés dans Angewandte Chemie International Edition comme Very Important Paper *, ces travaux ouvrent des perspectives thérapeutiques pour certaines maladies génétiques et certains cancers.
Les cellules de notre corps sont entourées d’une membrane qui doit à la fois les protéger et laisser passer certaines espèces, dont des ions. En effet, pour franchir cette barrière hydrophobe, les ions ont besoin de perdre l’eau qui les entoure dans une solution aqueuse et par la suite, selon le mécanisme de transport membranaire : soit être enrobés par une molécule transporteuse qui leur font franchir la barrière, soit emprunter un canal qui leur permette de traverser la membrane comme dans un tunnel. Or, à cause de leurs liaisons hydrogène plus difficiles à casser, les ions négatifs (anions) ont plus de mal à se déshydrater et à passer que les positifs (cations). Cela peut entraîner un déséquilibre au sein de la cellule et déboucher sur diverses maladies, les canalopathies, et des cancers. Des chercheurs de l’Institut européen des membranes (CNRS/ENSC Montpellier/Université de Montpellier) et de Lehn Institute for Functional Materials de l’université chinoise de Sun Yat-sen ont élaboré, par auto-assemblage, un canal capable de transporter des anions à travers une membrane cellulaire.
Celui-ci est composé de triazoles amphiphiles, des molécules organiques cycliques cumulant un groupe hydrophile et un groupe hydrophobe. Ils s’assemblent d’eux-mêmes pour former un échafaudage en colonne qui attrape et fait transiter anions et cations à travers la membrane cellulaire. L’autoassemblage a lieu en solution, à l’état solide et dans les membranes, et les chercheurs parviennent à le contrôler afin que le canal ne fonctionne que dans une seule direction à la fois. Ces travaux ouvrent une nouvelle voie pour le développement de médicaments contre les canalopathies et pour prévenir l’apparition de certains cancers.
Référence :
Shao-Ping Zheng, Yu-Hao Li, Ji-Jun Jiang, Arie van der Lee, Dan Dumitrescu et Mihail Barboiu. Self-assembled columnar triazole quartets: an example of synergistic hydrogen-bonding/anion–p interactions. Angewandte Chemie International Edition.
*choisis comme couverture de journal par les éditeurs