Un nouveau regard sur les cellules grâce à la lumière infrarouge

Résultats scientifiques

Des scientifiques ont mis au point une nouvelle méthode pour prolonger la durée de vie des protéines fluorescentes utilisées pour observer les cellules vivantes par microscopie. En co-illuminant ces protéines par de la lumière visible et de la lumière proche infrarouge, l’inévitable perte de fluorescence, bien connue sous le nom de photoblanchiment, est fortement réduite. Cette avancée est parue dans la revue Nature Biotechnology.

La microscopie de fluorescence est utilisée dans tous les laboratoires de biologie pour observer les cellules et étudier leur fonctionnement. Les constituants cellulaires sont visualisés par marquage avec des protéines fluorescentes, qui « brillent » sous l’effet d’une illumination par de la lumière visible. Malheureusement, cette illumination conduit également à une « usure » des protéines fluorescentes qui se traduit par une disparition progressive de la fluorescence au cours des expériences, parfois dans un temps aussi court que quelques minutes. Les cellules ne peuvent alors plus être observées. Ce phénomène, appelé « photoblanchiment », est une des principales limitations de la microscopie de fluorescence.

Des physico-chimistes du laboratoire Processus d'activation sélectif par transfert d'énergie uni-électronique ou radiatif (PASTEUR, CNRS/ENS – PSL/Sorbonne Université), en collaboration avec l’Institut Micalis (INRAE/AgroParisTech/UPSaclay), le laboratoire Jean Perrin (CNRS/Sorbonne Université) et l’unité Biologie cellulaire et cancer (Institut Curie - PSL/CNRS), présentent une approche très efficace pour contourner ce problème. Ils montrent en effet que la lumière proche infrarouge protège les protéines fluorescentes du photoblanchiment en induisant un mécanisme appelé RISC (Reverse Inter-System Crossing), qui n’avait jamais été exploité auparavant en microscopie de fluorescence. Lorsqu’on les illumine non plus seulement avec la lumière visible nécessaire pour obtenir la fluorescence, mais également avec de la lumière proche infrarouge, les protéines fluorescentes « brillent » jusqu’à neuf fois plus longtemps. Cette méthode simple à mettre en œuvre améliore considérablement les possibilités d’observation des cellules par microscopie de fluorescence. Récemment parue dans la revue Nature Biotechnology, elle devrait donner accès à une quantité de nouvelles informations biologiques.

Rédacteur : AVR

A gauche : Cellules HeLa marquées avec la protéine fluorescente EGFP et observées par microscopie de fluorescence sous illumination visible à 470 nm, en absence (en haut) ou en présence (en bas) de lumière proche infrarouge à 900 nm. La cellule du haut n’est plus visible au-delà de 80 secondes d’observation, tandis qu’on distingue encore la cellule du bas. A droite : Evolution temporelle de l’intensité de fluorescence des cellules dans les deux conditions d’illuminat. © Agathe Espagne

Référence

Near-infrared co-illumination of fluorescent proteins reduces photobleaching and phototoxicity
Lucie Ludvikova, Emma Simon, Mathieu Deygas, Thomas Panier, Marie-Aude Plamont, Jean Ollion, Alison Tebo, Matthieu Piel, Ludovic Jullien, Lydia Robert, Thomas Le Saux & Agathe Espagne
Nature Biotechnology 2023
https://doi.org/10.1038/s41587-023-01893-7

Contact

Agathe Espagne
Chercheuse au laboratoire Processus d'activation sélectif par transfert d'énergie uni-électronique ou radiatif (CNRS/ENS-PSL/Sorbonne Université)
Thomas Le Saux
Enseignant chercheur au laboratoire Processus d'activation sélectif par transfert d'énergie uni-électronique ou radiatif (CNRS/ENS-PSL/Sorbonne Université)
Lydia Robert
Chercheuse à l'Institut Micalis (INRAE/AgroParisTech/UPSaclay)
Stéphanie Younès
Responsable Communication - Institut de chimie du CNRS
Christophe Cartier dit Moulin
Chercheur à l'Institut parisien de chimie moléculaire & Chargé de mission pour la communication scientifique de l'INC
Anne-Valérie Ruzette
Chargée scientifique pour la communication - Institut de chimie du CNRS