Synthèse ultra-rapide de polymères à la fois biosourcés et dégradables

Résultats scientifiques

Des scientifiques du CNRS proposent une alternative aux plastiques comme les polyacrylates, polymères conventionnels issus des ressources fossiles notamment utilisés dans les cosmétiques. Ils ont développé une méthode de synthèse ultra rapide à partir de monomères issus du glucose ou de la lignine menant à des polymères, appelés polymuconates, dégradables dans des conditions douces. Des résultats qui font l’objet d’un article dans la revue Angewandte Chemie International Edition.

Les polymères conventionnels peuvent, en fin de vie, représenter un problème écologique. Ils sont en effet principalement issus de ressources fossiles. Mais pire encore, leur faible taux de recyclage (<20 %) conduit à leur accumulation dans l'environnement. D’où la nécessité de concevoir de nouveaux polymères qui soient à la fois biosourcés et capables de se dégrader après usage, tout en offrant les mêmes performances que les polymères actuels. Outre le recyclage mécanique avec certains polymères seulement, deux voies sont actuellement explorées pour leur recyclage chimique : un processus (bio)chimique pour revenir aux monomères d'origine, ou bien le « surcyclage » (upcycling en anglais) en produits chimiques à plus haute valeur ajoutée. 

Dans ce contexte, des scientifiques du CNRS, dans le cadre du laboratoire commun entre le Laboratoire de chimie des polymères organiques (Université de Bordeaux/CNRS/Bordeaux INP) et l’entreprise L’Oréal, proposent une alternative aux polyacrylates largement utilisés dans les cosmétiques et les emballages. Ils ont choisi comme monomères les muconates d'alkyle, dérivés de l'acide muconique, des molécules obtenues par fermentation de ressources renouvelables comme le glucose ou la lignine. Ils ont ensuite réalisé leur polymérisation appelée « polymérisation par transfert de groupe organocatalysée (O-GTP) ». Ses atouts : une réaction ultra-rapide convertissant 100 % du monomère en moins d’une minute dans le toluène à température ambiante, grâce à une base organique comme catalyseur, pour éviter le recours à des catalyseurs métalliques ou à des agents de contrôle soufrés.

Ils obtiennent ainsi des polymuconates de structure bien définie, pouvant trouver des applications dans le domaine des emballages biodégradables, comme revêtements, ou encore pour réaliser des dispositifs par impression 3D. Leur dégradation, dans des conditions douces par simple ozonolyse, conduit à des molécules fonctionnelles valorisables comme tensioactifs dans des applications médicales ou cosmétiques. Enfin, la présence de doubles liaisons internes dans la chaîne principale autorise de nombreuses post-modifications chimiques permettant d’ajuster leurs propriétés (rigidité, élasticité, solubilité) aux applications auxquelles on les destine.

Ces résultats, publiés dans la revue Angewandte Chemie International Edition, ouvrent la voie à des alternatives plus durables aux polymères vinyliques à base de pétrole. Ils permettent d’envisager une stratégie plus générale pour l’élaboration de nouvelles générations de polymères à la fois biosourcés mais également dégradables. 

Rédacteur : CCdM

Référence

Daniel TatonThomas DardéEmilie DiomarXavier Schultze
An Expedient Route to Bio-based Polyacrylate Alternatives with Inherent Degradation Capabilities by Organic Catalysis for Polymerization of Muconate Esters
Angewandte Chemie International Edition 2024
https://doi.org/10.1002/anie.202411249

Contact

Daniel Taton
Chercheur au Laboratoire de chimie des polymères organiques (CNRS/Université de Bordeaux/Bordeaux INP)
Communication CNRS Chimie