Observer directement le comportement du platine dans une pile à combustible
Des chercheurs du CNRS ont mis en évidence un phénomène jusqu’ici méconnu concernant la non-durabilité du platine, catalyseur utilisé dans les piles à combustible. Leur étude par diffraction de rayons X de haute énergie montre un processus de dégradation accéléré du platine au cours du fonctionnement de la pile, limitant son efficacité à long terme.
Les piles à combustible à membrane échangeuse de protons mettent en jeu des réactions électrochimiques pour convertir l'hydrogène en électricité1 . Le platine, utilisé comme catalyseur, joue un rôle crucial dans ce processus en accélérant les réactions chimiques mises en jeu. Les expériences menées au laboratoire sur un montage « modèle » montrent une bonne durabilité du platine sur le long terme. Ça n’est hélas plus le cas lorsque l’on essaie de se rapprocher des conditions de fonctionnement d’une pile à combustible où l’on constate une dégradation plus rapide du catalyseur. Un constat qui limite fortement le déploiement de cette technologie pourtant prometteuse à grande échelle.
Dans cette étude, des scientifiques du CNRS de l’Institut Charles Gerhardt (CNRS/Université de Montpellier/ ENSCM), en collaboration avec les scientifiques du Synchrotron Européen (ESRF) à Grenoble et d’une équipe du Centre interuniversitaire de recherche et d’ingénierie des matériaux (CNRS/Toulouse INP/Université de Toulouse), ont cherché à mettre en évidence l’origine de cette dégradation en observant directement le comportement du platine dans une pile à combustible en fonctionnement.
Pour y parvenir, les chercheurs ont utilisé, entre autres techniques d’analyse, la diffraction de rayons X très intenses à haute énergie générés par la source extrêmement brillante de l’ESRF. Cette technique leur a permis de suivre en temps réel l’évolution de la structure cristalline du platine au cours du fonctionnement de la pile (operando), et de façon non-intrusive.
Les résultats montrent que, contrairement à ce qui était connu en conditions modèles de laboratoire, le platine à la cathode d’une pile à combustible subit de multiples transitions entre sa phase métallique et une phase oxide amorphe très instable, et ce pour des tensions aux bornes de la pile parfaitement identifiées. Ce processus induit une forte accélération de la dissolution du platine, qui explique la diminution de sa durabilité.
La mise en lumière de ce phénomène, objet d’un article dans la revue Nature Communications, permet d’envisager de nouvelles stratégies de stabilisation du platine, invitant à agir au niveau du matériau lui-même, ou à l’échelle de pilotage du système pile à combustible, afin d’éviter les tensions critiques identifiées par l’étude.
Rédacteur : CCdM
- 1L hydrogène oxydé à l anode génère des protons et des électrons. Les électrons circulent dans le circuit externe pour fournir de l électricité, tandis que l oxygène est réduit à la cathode pour former de l eau en se recombinant avec les protons qui ont traversé la membrane polymérique et les électrons.
Référence
Carlos A. Campos-Roldán, Amir Gasmi, MeryemEnnaji, Morgane Stodel, Isaac Martens, Jean-Sébastien Filhol, Pierre-Yves Blanchard, Sara Cavaliere, Deborah Jones, Jakub Drnec and Raphaël Chattot
Metal-oxide phase transition of platinum nanocatalyst below fuel cell open-circuit voltage
Nature Communications 2025
https://doi.org/10.1038/s41467-024-55299-3