MOFs : Christian Serre fait du sur mesure pour notre environnement

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Avant son élection à l’Académie des sciences et la cérémonie officielle de réception du 4 juin dernier, Christian Serre avait déjà fait une entrée remarquée sous la coupole avec ses MOFs. Ces matériaux poreux présentent des propriétés que le chercheur CNRS ne cesse d’étendre, notamment à la production d’hydrogène, à la réduction et valorisation du CO2, entre autres.

Meilleur Ouvrier de France, Christian Serre ? Très certainement, mais son expertise porte sur les Metal Organic Frameworks (MOFs) et non sur la gastronomie. Il est l’un des chimistes, avec Bernard Henrissat[1]  et  Hélène Olivier-Bourbigou[2], à avoir rejoint cette année l’auguste Académie des sciences.

Cette entrée sous la coupole couronne sa carrière axée sur les MOFs, des solides poreux hybrides organiques-inorganiques ordonnés. Créateur de quelques centaines de variations de ces matériaux, Christian Serre, directeur de recherche CNRS, aujourd’hui à la tête de l’IMAP (CNRS - ENS/ESPCI/Université PSL), en multiplie les applications. Car ces « matériaux gruyère », comportent à l’échelle atomique des arrangements réguliers de trous dont on peut aisément moduler la composition et la structure, constituant ainsi des pièges bien utiles pour capturer des molécules indésirables.

Sa carrière a commencé en tant que chargé de recherche à l’Institut Lavoisier de Versailles, berceau des MOFs, où le célèbre cristallochimiste, Gérard Férey, fut l’un des premiers à mettre au point ce type de solides poreux hybrides, dont le squelette est composé à la fois de parties organiques et inorganiques. Une astuce pour moduler « à façon » la taille et la nature des cages sans pour autant compromettre la stabilité de l’ensemble. Les solides obtenus sont pour la plupart non toxiques, biodégradables, faciles à préparer en grande quantité, par conséquent, de moindre coût et industrialisables. Au sein de cet institut dont il prend la direction en 2015, Christian Serre, « chimiste en solution », comme il aime à se qualifier, se penche lui, sur leurs usages. L’Académie des sciences lui décerne déjà à ce titre, le « Prix fondé par l'État 2016 ».

D’un caractère posé mais déterminé, cet homme pragmatique traque de nombreuses pistes d’applications, initie de nouvelles thématiques, sans jamais abandonner son appétence pour la chimie fondamentale. Dès la création en 2016 de l’Institut des matériaux poreux de Paris (IMAP), il partage son temps entre les locaux de l’ENS et de l’ESPCI, récemment rénovés. En moins de dix ans, il a su fédérer autour de lui près d’une quarantaine de scientifiques de talent.

Dépollution de l’air, déshumidification, capture ou valorisation du CO2, production d’hydrogène, membranes pour batteries ou piles à combustibles etc…Christian Serre met sa chimie au service de l’Environnement et de l’Energie durable.

« A titre d’exemple, sur la partie capture du CO2, nous sommes montés en TRL[3] (Technology readiness level, actuellement entre 4 et 6) et sommes désormais très sollicités en France et à l’international par des partenaires industriels et académiques, pour qui les MOFs représentent des pistes d’applications très concrètes. L’industrie fait appel à nouveau plus volontiers la recherche fondamentale sur des problématiques qu’elle ne peut pas régler à court terme pour la décarbonation », se réjouit l’académicien.

 « Nous avons également collaboré pendant 10 ans avec des industriels sur la capture des composés organo-volatils dans l’air intérieur. Puis, nous avons approfondi ce sujet en co-fondant SquairTech, en 2021, start-up de la deeptech qui œuvre pour la qualité de l'air intérieur en capturant ou dégradant les gaz polluants. », raconte Christian Serre.

La thématique d’une chimie durable lui tient particulièrement à cœur. En témoigne son engagement dans le Domaine d’intérêt majeur de la région Ile de France (DIM) MaTerRE[4], qu’il dirige également, et qui porte sur les matériaux durables et la transition énergétique. Sans compter son implication dans les deux Programmes d’équipements prioritaires et de recherche (PEPR), DIADEM, pour la synthèse accélérée des matériaux avec l’IA et SPLEEN, sur la décarbonation de l’industrie.

Dans cette perspective, il conclut : « On n’a jamais eu autant besoin de la chimie ! »

 

Rédacteur : SY

 

[1] Directeur de recherche émérite CNRS au Laboratoire architecture et fonction des macromolécules biologiques. Professeur à l’université technique du Danemark au Département de biotechnologie et biomédecine

[2] https://www.academie-sciences.fr/fr/Liste-des-membres-de-l-Academie-des-sciences-/-O/helene-olivier-bourbigou.html

[3] évalue le niveau de maturité d'une technologie jusqu'à son intégration dans un système complet et son industrialisation

[4] MaTériaux avancés éco-Responsables -https://www.dim-materre.fr/

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