Le confinement chamboule aussi les plastiques !

Les plastiques sont largement utilisés dans des applications en couches minces, notamment en microélectronique. Si les propriétés physiques de ces films sont susceptibles de changer par rapport au matériau massique, aucun consensus n’a été obtenu à ce jour sur des éventuels changements de densité. Question tranchée par des scientifiques qui ont pour la première fois mesuré directement des variations de densité avec l’épaisseur de films très minces de deux plastiques très courants. Ces résultats sont à retrouver dans la revue Polymer.

Les plastiques sont des matériaux organiques constitués de gigantesques chaînes de polymères.  De nombreuses applications utilisent ces matériaux en films minces comme revêtements protecteurs, lubrifiants, couches adhésives ou encore couches isolantes en micro-électronique. Lorsque l'épaisseur de ces films diminue et se rapproche des dimensions caractéristiques des chaînes individuelles de polymère, les effets de confinement et les interactions dues à la présence de deux interfaces sont susceptibles de modifier profondément les propriétés physico-chimiques. De nombreuses études ont en effet montré que la température de ramollissement (température de transition vitreuse Tg), le coefficient d'expansion thermique, le vieillissement physique ou encore la mouillabilité sont profondément affectés par l’épaisseur du film. Parmi ces propriétés clés, les éventuelles variations de densité restent très controversées, notamment parce que la plupart des évaluations récentes étaient obtenues par des méthodes indirectes qui dépendent d’un modèle et d’hypothèses spécifiques. Aucun consensus sur une variation possible de la densité avec l'épaisseur des films n'a donc pu être obtenue à ce jour par la communauté scientifique.

Une équipe du Centre de recherche Paul Pascal (CNRS/Université de Bordeaux) et de l’Institut de recherche Dupuy de Lôme (CNRS/Université de Bretagne Sud) vient de résoudre cette énigme en développant une nouvelle technique expérimentale de dissolution de films plastiques monitorée par une microbalance à quartz. Cette approche leur a permis de mesurer directement des changements subtils de densité en fonction de l’épaisseur pour des films de deux plastiques très courants: le Polystyrène (PS) et le Polyméthacrylate de méthyle (PMMA ou Plexiglas). Ces travaux novateurs ont clairement montré une variation significative de la densité lorsque l’épaisseur des films est réduite en deçà d’une centaine de nanomètres. Une augmentation pour le PS et une diminution pour le PMMA ont été observées, en accord avec des travaux récents sur la variation des propriétés optiques de ces films.* La simplicité et l'originalité de cette approche apportent de nouvelles perspectives dans le domaine très actif des polymères en milieu confiné et, bien au-delà, dans les domaines des revêtements, de la biophysique, de la nanolithographie, des capteurs ou de la microélectronique.

*Probing The Density Variation of Confined Polymer Thin Films via Simple Model-independent Nanoparticle Adsorption. Unni et. al  Macromolecules  (2017), 50 ,1027–1036.

Rédacteur: AVR

Variation de la densité massique de films minces de Polystyrène (PS) et Polyméthacrylate de méthyle (PMMA) en fonction de leur épaisseur. © J.-P. Chapel G & Vignaud

Référence

Direct experimental evidences of the density variation of ultrathin polymer films with thickness, Joanna Giermanska, Soumaya Ben Jabrallah, Nicolas Delorme, Guillaume Vignaud et Jean-Paul Chapel, Polymer, juillet 2021

 

https://doi.org/10.1016/j.polymer.2021.123934

 

Contact

Jean-Paul Chapel
Chercheur, Centre de recherche Paul Pascal (CNRS/Université de Bordeaux)
Guillaume Vignaud
Chercheur, Institut de recherche Henri Dupuy de Lôme (CNRS/ENSTA BRETAGNE/UNIV BRETAGNE OCCIDENTALE/UNIV BRETAGNE-SUD)
Christophe Cartier dit Moulin
Chercheur à l'Institut parisien de chimie moléculaire & Chargé de mission pour la communication scientifique de l'INC
Anne-Valérie Ruzette
Chargée scientifique pour la communication - Institut de chimie du CNRS
Stéphanie Younès
Responsable Communication - Institut de chimie du CNRS