La RMN du solide pour comprendre l’aspergillose pulmonaire

Résultats scientifiques

Les spores d’agents fongiques tels qu'Aspergillus fumigatus, inhalés par des hôtes immunodéprimés, peuvent conduire à des maladies mortelles. Dans des travaux publiés dans la revue PNAS, des scientifiques de l’Institut de chimie et de biologie des membranes et nanoobjets (CNRS/Université de Bordeaux /Bordeaux INP) et de l'Institut européen de chimie et biologie (CNRS/Université de Bordeaux/Inserm), en collaboration avec l'Institut Pasteur, ont développé une nouvelle approche utilisant la spectroscopie de RMN du solide pour caractériser, à l'échelle atomique, l'évolution de la paroi cellulaire de ses spores tout au long de leur cycle de vie.

Les spores des agents pathogènes fongiques tels qu'Aspergillus fumigatus lui permettent de se disséminer dans l'air et d’être ainsi inhalé par des hôtes comme l’humain. Chez les hôtes sains, elles seront éliminées par le système immunitaire mais chez les hôtes vulnérables (immunodéprimés par exemple), elles conduisent à une maladie mortelle appelée aspergillose pulmonaire. D’où l’intérêt que portent les scientifiques à la composition de la paroi de ces spores tout au long de leur cycle de vie durant le processus de germination, car c’est cette paroi qui interagit avec le milieu extérieur.

Mais comprendre l'organisation moléculaire à l'échelle atomique de cette paroi cellulaire reste un défi. Elle est en effet constituée de nombreuses biomolécules comme des sucres, des protéines, des pigments et des lipides, souvent difficiles à identifier et à quantifier. De plus, la majorité des approches analytiques développées pour étudier ces parois cellulaires sont destructives car elles nécessitent une extraction sélective de ces biomolécules.

Des scientifiques de l’Institut de chimie et de biologie des membranes et nanoobjets (CNRS/Université de Bordeaux /Bordeaux INP) et de l'Institut européen de chimie et biologie (CNRS/Université de Bordeaux/Inserm), en collaboration avec l'Unité Mycologie moléculaire de l'Institut Pasteur (CNRS/Université Paris Cité) ont développé une nouvelle méthode d’analyse non destructive utilisant la spectroscopie de résonance magnétique nucléaire (RMN)(*) pour caractériser l'organisation moléculaire des spores fongiques du pathogène Aspergillus fumigatus et leur évolution tout  au long du processus de germination.

Ils ont ainsi pu comparer la composition et l'abondance de polysaccharides comme les glucanes et les chitines à trois stades morphologiques de la germination. Des méthodes plus poussées utilisant la rotation dite « à l'angle magique », ont permis de mettre en évidence le rôle du sucre appelé galactosaminogalactane, synthétisé lors de la germination, ainsi que la présence de triglycérides mobiles. En combinant ces données de RMN du solide permettant l'identification et la quantification des sucres avec des mesures d'accessibilité à la surface, des modèles d'organisation moléculaire d’A. fumigatus ont pu être proposés.

Cette nouvelle méthodologie de RMN du solide apporte des informations indispensables pour mieux comprendre la morphologie de ses spores tout au long du processus de germination et donc les interactions qu’elle sont susceptibles d’avoir avec leur environnement. Au-delà, elle pourrait également être utilisée pour étudier l’action de composés antifongiques sur cette organisation moléculaire.

(*) Ces travaux de recherche ont bénéficié de l’accès à la plateforme nationale Infranalytics (CNRS FR2054)

Rédacteur : CCdM

loquet
Etude de la paroi cellulaire des spores du pathogène fongique Aspergillus fumigatus par la spectroscopie de RMN du solide. © Antoine Loquet

 

Référence

Gaëlle Lamon, Alons Lends, Isabel Valsecchi, Sarah Sze Wah Wong, Vincent Duprès, Frank Lafont, James Tolchard, Christine Schmitt, Adeline Mallet, Axelle Grélard, Estelle Morvan, Erick J. Dufourc, Birgit Habenstein, J. Iñaki Guijarro, Vishukumar Aimanianda & Antoine Loquet
Solid-state NMR molecular snapshots of Aspergillus fumigatus cell wall architecture during a conidial morphotype transition

PNAS 2023

https://www.pnas.org/doi/10.1073/pnas.2212003120

Contact

Antoine Loquet
Chercheur à l'Institut Européen de chimie et biologie
Stéphanie Younès
Responsable Communication - Institut de chimie du CNRS
Anne-Valérie Ruzette
Chargée scientifique pour la communication - Institut de chimie du CNRS
Christophe Cartier dit Moulin
Chercheur à l'Institut parisien de chimie moléculaire & Chargé de mission pour la communication scientifique de l'INC