La recherche française en métallurgie forge son avenir à Toulouse

La quatrième édition du colloque « La métallurgie, quel avenir ! » s’ouvre ce 23 juin à Toulouse. La Présidente du Comité d’organisation, Christine Blanc, enseignante-chercheuse au Centre interuniversitaire de recherche et d’ingénierie des matériaux (CIRIMAT)1 , revient sur l’histoire de cet événement et les défis que souhaite relever la communauté des métallurgistes en France.

  • 1Unité CNRS/Toulouse INP/Université de Toulouse

Après Saint-Etienne en 2016, Nancy en 2019 et Grenoble en 2023, c’est au tour de Toulouse d’accueillir le colloque « La métallurgie, quel avenir ! ». Un rendez-vous désormais bien identifié par la communauté métallurgiste française, qui accueille à chaque édition plus de 200 participants.

Aux origines de « La métallurgie, quel avenir ! »

En 2016, l’Ecole des Mines de St-Etienne fêtait ses 200 ans. A cette occasion, les chercheurs(ses)-métallurgistes de l’Ecole ont souhaité organiser un colloque commémoratif. En collaboration avec l’Ecole des Mines, le Réseau National de la Métallurgie (RNM) et la Société Française de Métallurgie et de Matériaux (SF2M) ont organisé cet évènement, lequel, avec plus de 200 participants, a dépassé toutes les attentes et a servi de germe pour créer les colloques suivants.

Ce premier colloque « La métallurgie, quel avenir ! » a ainsi été l’une des premières actions d’envergure du RNM. 

L’existence du RNM trouve son origine dans un livre blanc rédigé conjointement par l’Académie des Sciences et par l’Académie des Technologies en 2011, les co-auteurs étant des autorités dans ce domaine : Yves Bréchet, André Pineau et Yves Quéré. « Ce livre blanc a mis en lumière nos forces, mais aussi nos faiblesses. Sur cette base, il a proposé des pistes d’actions », se remémore Christine Blanc, qui pilote le comité d’organisation de la quatrième édition du colloque. « La recherche française en métallurgie est d’un très haut niveau et jouit d’une excellente reconnaissance à l’échelle internationale, mais la métallurgie souffre d’une image qui ne correspond pas à la réalité. » Le livre blanc déplore ainsi que « vis-à-vis du grand public, cette science plusieurs fois millénaire jouit au mieux d’une image passéiste et au pire est associée aux problèmes qui ont affecté la sidérurgie lorraine au cours des 30 dernières années », alors que ce secteur innove et se réinvente sans cesse. Ce constat avait fait office d’électrochoc auprès du Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche qui avait alors mis en place un Comité d’Orientation Nationale, comprenant des représentants académiques et industriels du domaine de la métallurgie, chargé de lui faire des propositions. Parmi celles-ci, figurait en bonne place la création d’un réseau regroupant des structures de recherche et des sociétés industrielles : cela a donné lieu à la création effective du RNM fin 2014

Composante de la SF2M, le RNM regroupe aujourd’hui plus de quarante membres institutionnels : laboratoires universitaires et organismes nationaux de recherche, industriels et fédérations d’entreprises. Ses objectifs sont clairs : renforcer les liens entre les partenaires industriels et académiques, structurer la recherche et la formation dans le domaine de la métallurgie, mener des actions de communication visant à donner une image moderne et attractive de ce secteur d’activité, aider aux actions de formation dans les domaines de la métallurgie et des matériaux dans l’enseignement supérieur.

Une communauté dynamique

« La métallurgie, quel avenir ! » est ainsi l’occasion de montrer l’excellence et le dynamisme de la recherche en métallurgie. De la durabilité à la caractérisation microstructurale en passant par les propriétés mécaniques, les procédés de fabrication et les moyens de protection des surfaces, les scientifiques ont l’opportunité d’échanger sur des problématiques communes. L’intelligence artificielle, dont l’utilisation croissante s’observe dans toutes les disciplines, est également à l’honneur avec une session dédiée à la métallurgie numérique.

« Sous l’égide de la SF2M et du RNM, le CIRIMAT, qui compte sept membres dans le comité d’organisation du colloque et six dans le comité scientifique, porte ce colloque qui se déroulera dans les locaux de l’INSA de Toulouse », détaille Christine Blanc. « Le CIRIMAT est soutenu dans cette action par d’autres laboratoires de la région toulousaine, à savoir le Centre d'élaboration de matériaux et d'études structurales (CEMES)1 , l’Institut Clément Ader (ICA)2 , ou encore le Laboratoire génie de production (LGP)3 . Les établissements et laboratoires du Grand Toulouse ont donc uni leurs forces pour faire de ce colloque une belle réussite et réunir des représentants de toutes les équipes de recherche françaises travaillant dans le domaine de la métallurgie », se réjouit la professeure toulousaine. « Le CNRS est présent aux côtés de ses partenaires académiques comme Toulouse INP, l’Université de Toulouse et l’INSA de Toulouse. »

L’implication du milieu économique

L’autre objectif du symposium est de renforcer les interactions avec les acteurs industriels en matière de formation et de recherche. Le colloque est ainsi soutenu financièrement par Aubert&Duval, Safran, Framatome et TotalEnergies. Au-delà de ces quatre groupes, de nombreuses entreprises participent : d’EDF à ArcelorMittal en passant par Orano et Saint-Gobain… sans oublier les PME. « Cette large participation des acteurs du monde industriel démontre nos fortes relations avec le milieu économique. Ces dernières sont, pour une part, tournées vers le secteur de l’aéronautique à Toulouse, mais ne s’y limitent pas », relève Christine Blanc.

Cet intérêt du milieu économique peut s’expliquer par l’excellence de la recherche académique, appelée à ruisseler vers l’industrie, mais aussi par la désaffection qui touche aussi les entreprises de la métallurgie. Alors que le secteur employait 1,6 million de salariés en 2024, selon les chiffres de l’Observatoire de la métallurgie, beaucoup d’entreprises peinent à recruter. Les acteurs économiques s'associent donc aux efforts du Réseau National de la Métallurgie pour promouvoir les métiers de la métallurgie auprès des jeunes.

Des efforts qui portent leurs fruits

Alors que le rapport du Comité d’Orientation Nationale remis au ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche a été publié il y a maintenant onze ans, que dire du chemin parcouru ? « Depuis la parution de ce rapport, la communauté des métallurgistes français a su faire preuve d’une grande proactivité », estime Christine Blanc. « Nous avons proposé un programme national avec des actions structurantes, comme la création d’un réseau et la mise en place de ce colloque qui devient un rendez-vous incontournable pour nous tous. »

La scientifique souligne également l’investissement de CNRS Chimie. L’institut a ainsi joué un rôle-clé dans le renforcement de la communauté sur la thématique de la corrosion en proposant une action Convergence sur ce thème en 2023. Cet outil, qui vise aussi à structurer les communautés scientifiques, peut donner lieu à la mise en place de fédérations de recherche ou au recrutement de chaires professeur junior (CPJ). Suite à l’action Convergence, un jeune chercheur a ainsi pu intégrer l’Institut de recherche de chimie Paris4 .

Les initiatives de la communauté « Corrosion » ont aussi été formalisées dans le cadre de l’Agence pour l’énergie décarbonée, créée en 2024. « Nous espérons que toutes ces actions combinées permettront à la communauté des métallurgistes français de rebondir et de continuer à développer des innovations au service de la société », conclut Christine Blanc.

Rédacteur : CD

  • 1Unité CNRS
  • 2Unité CNRS/IMT Mines Albi – Institut Mines-Telecom/INSA de Toulouse/ISAE-Supaero/Université de Toulouse
  • 3Unité Université de technologie Tarbes Occitanie Pyrénées/Université de Toulouse
  • 4Unité CNRS/Chimie ParisTech-PSL