Du carbone 13 pour étudier le métabolisme d’une molécule antipaludique

Résultats scientifiques Vivant et santé Molécules

Mieux comprendre le métabolisme de la plasmodione, une molécule prometteuse dans le traitement du paludisme, est aujourd’hui possible. Après avoir mis au point sa synthèse totale, les chercheurs ont pu enrichir le composé en carbone 13, ce qui leur permettra de suivre ses biotransformations par spectroscopie et d’étudier le comportement de ses métabolites, in vitro et in vivo. Ces travaux, menés conjointement par le Laboratoire d’Innovation Moléculaire et Applications (CNRS/Université de Strasbourg/Université Haute-Alsace), l’Institut de biologie moléculaire et cellulaire (Université de Strasbourg, CNRS, Inserm), l’institut allemand Max Planck et le laboratoire d’études du métabolisme des médicaments (CEA) font la couverture de la revue Organic & Biomolecular Chemistry.

Près de la moitié de la population mondiale est exposée au risque de paludisme dont la mortalité ne se compare qu’à celle associée à la tuberculose ou au sida. Un des enjeux de la recherche est de développer de nouveaux traitements curatifs, dans lesquels s’inscrit la découverte récente de la plasmodione1, une molécule prometteuse pour son activité antipaludique mais dont le métabolisme est encore méconnu. Pour mieux connaître les biotransformations de cet agent dans l’organisme et détecter les métabolites qu’il libère via une cascade de réactions à l’intérieur du globule rouge parasité, des chercheurs viennent de mettre au point une stratégie novatrice : en synthétisant intégralement cette molécule enrichie en carbone 13 et sept de ses métabolites potentiels, ils ont créé les outils moléculaires qui, analysés par spectroscopie de masse dans les parasites, leur permettront de comprendre le métabolisme de la plasmodione in vitro et in vivo.

La synthèse de ce composé pluri-aromatique, réalisée en 10 étapes, aura nécessité deux ans de travail en laboratoire. L’obtention de la plasmodione enrichie en carbone 13 au niveau de 18 atomes de carbone et de sept de ses métabolites permettra l’étude par spectroscopie de leurs interactions avec les systèmes biologiques complexes du parasite dans la cellule hôte lors des différents stades de son développement, y compris dans les stades transmissibles au moustique vecteur. Les chercheurs espèrent découvrir de nouveaux métabolites actifs afin d’optimiser cette tête de série antipaludique. Ils ont ainsi pu observer un métabolite actif contre le parasite mais majoritairement éliminé dans les urines de souris. Très didactiques, ces travaux constituent un excellent exemple de chimie organique appliquée à la synthèse des molécules lourdes, enrichies en carbone 13, et à l’étude du métabolisme des petites molécules par la préparation de métabolites potentiels. Ils pointent l’importance des collaborations interdisciplinaires qui permettent aux chimistes travaillant à l’interface avec la biologie de synthétiser et de mettre à disposition des biochimistes et biologistes des outils moléculaires-clefs pour l’étude des mécanismes d’action de composés biologiquement actifs et leur optimisation.

 

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Synthèse d'outils chimiques pour l'étude du métabolisme de la plasmodione antipaludique, la 13C18–plasmodione, enrichie au niveau de 18 atomes de carbone, et de sept métabolites potentiels

©Elisabeth Davioud-Charvet

 

 

Référence

Liwen Feng,  Don Antoine Lanfranchi,  Leandro Cotos,  Elena Cesar-Rodo,  Katharina Ehrhardt,  Alice-Anne Goetz,  Herbert Zimmermann,  François Fenaille,  Stephanie A. Blandin  &  Elisabeth Davioud-Charvet. 
Synthesis of plasmodione metabolites and 13C-enriched plasmodione as chemical tools for drug metabolism investigation 
Organic & Biomolecular Chemistry – Mars 2018 
doi: 10.1039/C8OB00227D 
Cover page : http://xlink.rsc.org/?DOI=C8OB00227D

 

 

Contact

Stéphanie Blandin
Elisabeth Davioud-Charvet
Chercheuse au Laboratoire d'innovation moléculaire et applications
Sophie Félix
Chargée de communication
Stéphanie Younès
Responsable Communication - Institut de chimie du CNRS
Christophe Cartier dit Moulin
Chercheur à l'Institut parisien de chimie moléculaire & Chargé de mission pour la communication scientifique de l'INC