Des spins moléculaires qui répondent à la lumière

Résultats scientifiques

La lumière peut être utilisée pour faire fonctionner rapidement et efficacement des systèmes quantiques, comme les ordinateurs quantiques. Des chercheurs de l’Institut de Technologie de Karlsruhe (KIT, Allemagne), de l´Université de Strasbourg et du CNRS à Chimie ParisTech (Paris, France) ont obtenu des nouvelles molécules à base d’ions de terres rares, l’europium, qui peuvent être utilisées comme unités quantiques fondamentales et dont les spins nucléaires sont manipulables par la lumière. Cette avancée importante est publiée dans la revue Nature Communications.

Les ordinateurs classiques fonctionnent avec ce qu’on appelle des bits. L’état d’un bit est soit 0 ou 1. Les ordinateurs quantiques, par contre, utilisent pour traiter l’information des bits quantiques (qubit) qui peuvent être simultanément dans de nombreux états entre 0 et 1 en raison d’une propriété de la mécanique quantique appelée superposition quantique. Cela permet de traiter les données en parallèle et d’augmenter la puissance de calcul des ordinateurs quantiques de façon exponentielle par rapport aux ordinateurs classiques. Afin de développer des ordinateurs quantiques, les états de superposition d’un qubit doivent persister suffisamment longtemps : on parle de temps de cohérence. Ces états de superposition sont perturbés par les fluctuations alentours, ce qui raccourci leur temps de cohérence. Pour préserver l’état de superposition assez longtemps pour le traitement de l'information quantique, il est nécessaire d’isoler les qubits d'un environnement bruyant. Les niveaux de spin nucléaire dans les molécules peuvent être utilisés pour créer des états de superposition avec de longs temps de cohérence car ils sont bien protégés de l’environnement.

Une équipe internationale de l’Institut de technologie de Karlsruhe (KIT, Allemagne), du Centre européen des sciences quantiques de Strasbourg (CESQ) et du CNRS à Chimie ParisTech (Paris, France) a mis au point une nouvelle molécule à base de terres rares qui contient des spins nucléaires pouvant constituer des qubits manipulables par la lumière. Cette molécule, un dimère d'europium trivalent, a permis la première démonstration d’une polarisation de spin nucléaire induite par la lumière dans une molécule contenant de l'europium. Ce résultat, publié dans la revue Nature Communications, constitue un pas prometteur vers le développement d’architectures informatiques quantiques basées sur des molécules à base de terres rares.

Pour en savoir plus

Une molécule contenant de l'europium comme qubit de spin nucléaire manipulable par la lumière. © C. Grupe, KIT

Référence

Optical spin-state polarization in a binuclear europium complex towards molecule-based coherent light-spin interfaces Kuppusamy Senthil Kumar, Diana Serrano, Aline M. Nonat, Benoît Heinrich, Lydia Karmazin, Loïc J. Charbonnière, Philippe Goldner et Mario Ruben Nature Communications 12 avril 2021

 

https://doi.org/10.1038/s41467-021-22383-x

Contact

Diana Serrano
Chercheuse - Institut de recherche de chimie Paris (CNRS/Chimie ParisTech/Université PSL)
Philippe Goldner
Chercheur, Institut de recherche de chimie Paris (CNRS/Chimie ParisTech/Université PSL)
Mario Ruben
Professeur, Institut de technologie de Karlsruhe (KIT, Allemagne) et Centre européen des sciences quantiques de Strasbourg (CESQ)
Christophe Cartier dit Moulin
Chercheur à l'Institut parisien de chimie moléculaire & Chargé de mission pour la communication scientifique de l'INC
Anne-Valérie Ruzette
Chargée scientifique pour la communication - Institut de chimie du CNRS
Stéphanie Younès
Responsable Communication - Institut de chimie du CNRS