Des nanopérovskites moulées sur du savon pour produire de la lumière polarisée

Résultats scientifiques

Quand une onde lumineuse se propage en ligne droite, elle oscille perpendiculairement à sa direction de propagation. Quand ces oscillations sont toutes orientées de la même façon, on parle de polarisation linéaire ou circulaire (CPL) de la lumière. Des scientifiques, réunis autour du Laboratoire international associé Chiral nanostructures for photonic applications (LIA-CNPA, CNRS/Université de Kyoto), ont synthétisé un nouveau convertisseur de lumière naturelle en CPL, grâce à un « savon », ou molécule tensioactive, qui s’organise en escalier. Ce dernier est utilisé pour créer des nanoobjets hélicoïdaux en silice, sur lesquels sont greffés des nanocristaux de pérovskite. Ces travaux sont publiés dans la revue ACS NanoLetters, ce système versatile ne demande que trois composants et est rapide à préparer.

En plus de son intensité lumineuse et de sa couleur, la lumière peut avoir une polarisation : c’est-à-dire que ses oscillations, perpendiculaires à la direction du faisceau lumineux, sont orientées d’une même manière. Lorsque leur orientation varie selon un mouvement de rotation, vers la droite ou la gauche, on parle alors de lumière polarisée circulairement (CPL). Dans la nature, elle est produite par des scarabées, des crustacés ou les larves de lucioles. La CPL a un effet positif sur la vitesse de croissance de certaines plantes et sur l’efficacité de conversion énergétique des systèmes photovoltaïques. Afin de convertir la lumière naturelle en CPL, des chercheurs du laboratoire Chimie et biologie des membranes et des nanoobjets (CBMN, CNRS/Université de Bordeaux/Bordeaux INP), de l’université de Kyoto (Japon), de l’université de Lorraine (LCP-A2MC), du Bordeaux imaging centre (BIC, CNRS/INSERM/Université de Bordeaux) et de l’université technique de Munich (Allemagne), ont synthétisé des films transparents de nanohélices de silice, sur lesquelles sont greffés des nanocristaux de pérovskite. Leur approche combine un processus de synthèse très versatile, plus simple et d’impact écologique réduit. 

Pour cela, les chercheurs ont eu l’idée d’utiliser une molécule tensioactive, une sorte de savon, qui s’auto-assemble spontanément dans l’eau sous forme d’escalier en colimaçon. Selon la molécule choisie, l’escalier tournera vers la gauche ou vers la droite. Une fois solidifié, ce nano-escalier sert de moule pour appliquer à température ambiante un film de silice de quelques nanomètres d’épaisseur, sur lequel est greffé de façon contrôlée (sur des marches spécifiques de l’escalier) des nanocristaux de pérovskite. En fonction de leur composition exacte, ces cristaux, ou quantum dots, absorbent ou émettent de la lumière, d’une manière qui est également influencée par le sens de rotation du système. Ainsi, seuls trois composants sont nécessaires à la fabrication de ce convertisseur de lumière naturelle en CPL, qui est transparent : une propriété cruciale pour les applications optiques. Ces travaux ont été menés dans le cadre du Laboratoire international associé Chiral nanostructures for photonic applications (LIA-CNPA, CNRS/Université de Kyoto).

À gauche, détail des nanohélices et des nanocristaux. À droite, l’émission de CPL par des supports transparents. © Liu et al.

Référence

Peizhao Liu, Wei Chen, Yutaka Okazaki, Yann Battie, Lysiane Brocard, Marion Decossas, Emilie Pouget, Peter Müller-Buschbaum, Brice Kauffmann, Shaheen Pathan, Takashi Sagawa, and Reiko Oda. Optically Active Perovskite CsPbBr3 Nanocrystals Helically Arranged on Inorganic Silica Nanohelices. ACS Nano Letters, 03/09/2020.

https://pubs.acs.org/doi/10.1021/acs.nanolett.0c02013

 

Contact

Reiko Oda
Directrice de recherche CNRS au CBMN (UMR5248, CNRS/Université de Bordeaux/Bordeaux INP)
Stéphanie Younès
Responsable Communication - Institut de chimie du CNRS
Anne-Valérie Ruzette
Chargée scientifique pour la communication - Institut de chimie du CNRS