Des mousses pour récupérer proprement les métaux des e-déchets

Résultats scientifiques

La récupération des métaux contenus dans les déchets issus des équipements électriques et électroniques, les e-déchets, est un enjeu majeur pour préserver les ressources naturelles. Dans une étude récemment publiée dans la revue ACS Sustainable Chemistry and Engineering, des chimistes du SIMM (CNRS/ESPCI Paris/Sorbonne Université) et de l’IRCP (CNRS/Chimie Paristech) présentent une solution innovante qui utilise des mousses aqueuses, composées à 90 % en volume d’air et seulement 10 % d’une solution acide, pour dissoudre et récupérer efficacement et proprement le cuivre ou l’argent des e-déchets. Ces résultats, extensibles à d’autres métaux, ouvrent de nouvelles voies très prometteuses de recyclage qui génèreraient des faibles quantités d’effluents polluants par rapport aux procédés actuellement utilisés.

La récupération d’une grande variété de métaux contenus dans les déchets d'équipements électriques et électroniques, également appelés e-déchets, devient un enjeu majeur pour préserver les ressources naturelles. L'hydrométallurgie, traditionnellement utilisée par l'industrie minière pour traiter les minerais, est également prometteuse pour la récupération des métaux tels que le platine, l’or, l’argent ou le cuivre contenus dans certains composants des e-déchets. Elle est basée sur le principe de lixiviation* à l’aide de liquides oxydants ou acides qui dissolvent les métaux contenus dans les déchets broyés. En choisissant soigneusement les lixiviants, il est possible d'obtenir un procédé sélectif pour l'extraction des métaux précieux. Le développement de l'hydrométallurgie est cependant freiné par les grandes quantités d'effluents polluants tels que le cyanure ou l'acide sulfurique générés par ce procédé.

Dans ce contexte, des chimistes du laboratoire Sciences et ingénierie de la matière molle (CNRS/ESPCI Paris/Sorbonne Université), en collaboration avec une équipe de l’Institut de recherche de chimie Paris (CNRS/Chimie Paristech), ont mis au point une alternative astucieuse qui consiste à utiliser des mousses aqueuses plutôt que des liquides de lixiviation. L’avantage majeur est que les mousses contiennent entre 74 et 99% d'air et sont par conséquent d’excellentes candidates pour réduire les volumes d'effluents et l’empreinte environnementale de d’hydrométallurgie. Une première preuve de concept a ainsi été obtenue pour le cuivre (Cu), lixivié à l'aide d’une mousse contenant de l'acide chlorhydrique (HCl) et stabilisée par l'éther alkylique de polyoxyéthylène comme tensioactif. Ils ont ici mis à profit le pouvoir oxydant du dioxygène (O2) présent dans les bulles d'air et ont démontré que le transfert rapide d'O2 à travers les mousses permet une oxydation rapide et efficace du cuivre. En utilisant l'ozone (O3), ils ont également montré que ces mousses peuvent être appliquées à la lixiviation de l'argent, un métal plus précieux. Ce concept, publié dans la revue ACS Sustainable Chemistry and Engineering, est extensible à d’autre métaux et ouvre de nouvelles voies prometteuses de recyclage pour les métaux contenus dans les e-déchets avec une empreinte environnementale faible.

La lixiviation (du latin lixivium, « lessive ») désigne, dans le domaine de la chimie, de la pharmacie ou des sciences du sol, toutes les techniques d'extraction de produits solubles par un solvant.

Rédacteur: AVR

Des mousses pour oxyder et dissoudre les métaux des déchets électroniques © Cécile Monteux

Référence

Leaching Foams for Copper and Silver Dissolution: A Proof of Concept of a More Environmentally Friendly Process for the Recovery of Critical Metals, Pierre Trinh, Alesya Mikhailovskaya, Mengxue Zhang, Patrick Perrin, Nadège Pantoustier, Grégory Lefèvre et Cécile Monteux

ACS Sustainable Chem. Eng. 12 octobre 2021

https://doi.org/10.1021/acssuschemeng.1c02258

Contact

Cécile Monteux
Chercheuse, Sciences et ingénierie de la matière molle (CNRS/ESPCI Paris/Sorbonne Université)
Gregory Lefevre
Chercheur à l'Institut de recherche de chimie Paris (CNRS/ENSCP/Ministère de la culture)
Christophe Cartier dit Moulin
Chercheur à l'Institut parisien de chimie moléculaire & Chargé de mission pour la communication scientifique de l'INC
Anne-Valérie Ruzette
Chargée scientifique pour la communication - Institut de chimie du CNRS
Stéphanie Younès
Responsable Communication - Institut de chimie du CNRS