Des composés rédox-actifs pour booster la production d’hydrogène

Résultats scientifiques Catalyse Energie

Concevoir des catalyseurs performants et durables pour produire de l’hydrogène est la condition sine qua non pour faire de la filière hydrogène une source d’énergie pertinente pour le futur. Des chercheurs de l’Institut des sciences moléculaires de Marseille (CNRS/AMU) et du Laboratoire de chimie et biologie des métaux de Grenoble (CNRS/CEA/UGA) ont conçu un système catalytique inédit, à base de cobalt et d’un ligand capable de stocker des électrons, qui s’avère particulièrement efficace et plus économe en énergie que ceux existants. Ces travaux sont publiés en tant que « Hot paper » dans la revue Chemistry, A European Journal.

Afin de subvenir aux besoins de la planète et de réduire la dépendance aux énergies fossiles, l'hydrogène est aujourd’hui envisagé comme une source d’énergie alternative de premier choix. Il peut être produit par électrolyse de l’eau, procédé qui consiste à décomposer la molécule d’eau (H2O) en oxygène (O2) et en hydrogène (H2) à l'aide d'un courant électrique. Or le catalyseur – élément clé de cette réaction chimique –, à ce jour le plus performant, se compose de platine, métal noble, rare et cher, qui rend le procédé trop couteux pour une utilisation industrielle. Le défi actuel est donc d’élaborer des catalyseurs alternatifs, formés de métaux non nobles, qui soient aussi efficaces pour synthétiser l’hydrogène.

C’est là le résultat que des chercheurs de l’Institut des sciences moléculaires de Marseille (CNRS/AMU) et du Laboratoire de chimie et biologie des métaux de Grenoble (CNRS/CEA/UGA) ont obtenu en concevant un complexe catalytique formé d’un métal abondant, le cobalt, et d’un ligand (1) particulier, le thiosemicarbazone. Ce ligand est rédox-actif, autrement dit il peut emmagasiner des électrons et donc servir de médiateur dans la catalyse. Un tel système catalytique doté de deux sites de stockage des électrons et des protons (l’un au niveau du métal, l’autre au niveau du ligand) optimise la réduction des protons en hydrogène.

Les chercheurs ont ensuite étudié le comportement et les performances de ce nouveau catalyseur en combinant des données expérimentales (rendement de la production d’hydrogène) et de modélisation (décomposition des étapes de la réaction de catalyse et identification des composés formés à chaque étape). Résultat : avec une vitesse de réaction et un rendement équivalents aux catalyseurs disponibles, et un coût énergétique moins élevé, le nouveau complexe catalytique se place parmi les meilleurs existants. Si d’autres travaux doivent être réalisés avant d’envisager une utilisation à large échelle, ces résultats témoignent de la pertinence d’utiliser des ligands rédox-actifs pour améliorer les procédés de synthèse catalytique de l’hydrogène.

(1) Molécule capable de se lier spécifiquement à une autre molécule ou atome, ici au cobalt.

Image retirée.
À droite : graphe comparatif des performances des catalyseurs (vitesse de catalyse, énergie requise). Les courbes en orange et bleu désignent respectivement les complexes de nickel et de cobalt les plus performants de la littérature. Les courbes verte et rouge désignent respectivement les complexes de nickel et de cobalt conçus par l’iSm2 et le LCBM ; le complexe de cobalt et de thiosemicarbazone se distingue par une dépense énergétique moins élevée que les autres, ce qui en fait un catalyseur particulièrement compétitif.
À gauche : représentation du catalyseur à base de cobalt et du ligand thiosemicarbazone (les flèches indiquent les sites de rencontres entre électrons et protons).
© M. Orio

Référence

T. Straistari, R. Hardré, J. Fize, S. Shova, M. Réglier, V. Artero, M. Orio
Experimental and theoretical studies of a thiosemicarbazone cobalt electrocatalyst for proton reduction.
Chem. Eur. J.Avril 2018
DOI:10.1002/chem.201801155

Contact

Maylis Orio
Chercheuse à l'Institut des sciences moléculaires de Marseille (CNRS/Aix Marseille Université/Centrale Méditerranée)
Sophie Félix
Chargée de communication
Stéphanie Younès
Responsable Communication - Institut de chimie du CNRS
Christophe Cartier dit Moulin
Chercheur à l'Institut parisien de chimie moléculaire & Chargé de mission pour la communication scientifique de l'INC