Des catalyseurs artificiels qui imitent de mieux en mieux les enzymes

Résultats scientifiques

Les enzymes sont des catalyseurs biologiques naturels qui réalisent des transformations biochimiques sélectives dont l’efficacité réside dans la multitude de fonctions chimiques dont ils sont dotés. Hélas, ces fonctions souvent complexes sont très difficiles à reproduire dans des systèmes non biologiques. C’est maintenant chose faite par des scientifiques de l’Institut des sciences chimiques de Rennes (CNRS/ENSC Rennes/Université de Rennes 1/INSA Rennes) qui ont développé une approche inédite pour synthétiser des systèmes non biologiques, purement organométalliques, capables de catalyser des réactions chimiques avec des degrés de sélectivité et des cinétiques comparables à celles obtenues par des enzymes naturels. Ces résultats sont à retrouver dans la revue Angewandte Chemie avec le label « Hot Paper ».

La nature utilise des enzymes pour catalyser des réactions chimiques très performantes du point de vue de l’activité et de la sélectivité, dans des conditions de pression et température douces. Ces performances résultent, en particulier, des stratégies fines de reconnaissance moléculaire que les enzymes sont capables d’induire, permettant ainsi de sélectionner précisément les espèces qui vont réagir. La réaction a ainsi lieu au sein de l’enzyme à un endroit précis appelé site actif, que l’enzyme a spécifiquement modelé pour une réaction donnée.

Pour ces raisons, les enzymes ont toujours été considérées comme de précieuses sources d’inspiration pour les chimistes. Mais le développement de catalyseurs non-biologiques mimant le comportement des enzymes est difficile à réaliser compte tenu de leur grande taille mais aussi de leur complexité. Malgré cela, une équipe de l’Institut des sciences chimiques de Rennes (CNRS/ENSC Rennes/Université de Rennes 1/INSA Rennes) vient de synthétiser des nouveaux catalyseurs faisant intervenir uniquement des espèces organométalliques*. De taille relativement modeste par rapport aux enzymes, ces catalyseurs présentent une cavité bien adaptée à la reconnaissance moléculaire de certains substrats et un site actif situé à la surface du catalyseur, donc facilement accessible pour réaliser des interactions et des réactions chimiques. Plus particulièrement, les chercheurs se sont intéressés à fonctionnaliser des substrats azotés car ils sont bien connus pour présenter une mauvaise réactivité et conduisent, pour cette raison, à des mélanges de produits.

Pour des réactions de fonctionnalisation des liaisons carbone-hydrogène qui intéressent tout récemment l’industrie pharmaceutique et les chimistes des matériaux, les premiers résultats montrent que les performances de ces catalyseurs n’ont rien à envier à celles des enzymes dont les scientifiques se sont inspirés.

* Composé organique présentant au moins une liaison carbone-métal.

Rédacteur : CCdM

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© R. Gramage-Doria

Référence

Jonathan Trouvé, Paolo Zardi, Shaymaa Al-Shehimy, Thierry Roisnel & Rafael Gramage-Doria
EnzymeLike Supramolecular Iridium Catalysis Enabling CH Bond Borylation of Pyridines with metaSelectivity

Angewandte Chemie Int. Ed. 2021

https://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1002/anie.202101997

Contact

Rafael Gramage-Doria
Chercheur à l'Institut des sciences chimiques de Rennes
Stéphanie Younès
Responsable Communication - Institut de chimie du CNRS
Anne-Valérie Ruzette
Chargée scientifique pour la communication - Institut de chimie du CNRS
Christophe Cartier dit Moulin
Chercheur à l'Institut parisien de chimie moléculaire & Chargé de mission pour la communication scientifique de l'INC