De nouvelles cages moléculaires pour dépolluer les écosystèmes aquatiques contaminés

Développement durable Résultats scientifiques

Les centrales électriques à charbon ou l’extraction de certains minerais rejettent dans l’environnement des ions comme le thallium présentant une forte toxicité pour tous les organismes vivants. Des scientifiques viennent de concevoir une cage moléculaire capable de piéger sélectivement ces ions que l’on retrouve dans des milieux aquatiques contaminés.

La contamination des écosystèmes par le thallium est un problème environnemental majeur. Celle-ci est étroitement liée aux activités humaines comme la production d’énergie à partir de centrales à charbon ou encore l’extraction de certains minerais qui larguent cet élément dans les écosystèmes. Même à des concentrations très basses, ce métal présente une très forte toxicité pour les êtres humains et les organismes vivants en général. D’où l’importance de pouvoir détecter, piéger et extraire ce polluant qui se trouve principalement sous forme ionique (Tl+).

Les cages supramoléculaires organiques appelées cryptophanes sont connues depuis longtemps pour leur pouvoir d’encapsulation. Ces composés présentent en effet des propriétés remarquables de reconnaissance moléculaire qui permettent d’envisager des applications biologiques ou biochimiques.

Dans ce contexte, des scientifiques du Laboratoire de chimie de l’ENS de Lyon et du CEA de Paris-Saclay ont synthétisé un nouveau cryptophane sur lequel ils ont greffé des fonctions organiques spécifiques, phénols et amines aromatiques, des groupements donneurs d’électrons dont l’ion Thallium est friand.  Ils ont ensuite caractérisé les complexes cryptophane-Thallium formés lors du processus de piégeage. Leurs mesures par titration calorimétrique isotherme (ITC) et résonance magnétique nucléaire (RMN) du noyau 205Tl montrent que ces nouveaux systèmes présentent une très forte affinité pour l’ion Tl+ et une excellente sélectivité par rapport à d’autres espèces ioniques non toxiques potentiellement présentes en solution comme les ions potassium (K+).

Hélas, pour l’instant, le milieu aqueux doit être basique pour que le piégeage soit efficace. L’ingénierie chimique doit donc maintenant prendre le relais pour concevoir des cryptophanes capables de piéger efficacement ces ions quel que soit le pH de l’eau. Il sera alors possible d’envisager leur utilisation pour la décontamination des milieux aquatiques pollués, même à de très basses concentrations. Ces travaux font l’objet d’une publication dans le Journal of Organic Chemistry.

 

Rédacteur : CCdM

Référence

Rajaa Benchouaia, Martin Doll, Patrick Berthault, Kévin Chighine, Estelle Léonce, Thierry Brotin & Nicolas De Rycke

A Water-Soluble Cryptophane Decorated with Aromatic Amine Groups Shows High Affinity for Cesium and Thallium(I)

J. Org. Chem. 2024

https://pubs.acs.org/doi/abs/10.1021/acs.joc.3c02791

Complexation d’un ion thallium(I) au sein de la cavité du cryptophane en milieux aqueux © Nicolas De Rycke

Contact

Nicolas De Rycke
Enseignant-chercheur au Laboratoire de chimie (ENS de Lyon/CNRS)
Thierry Brotin
Chercheur au Laboratoire de chimie (ENS de Lyon/CNRS)
Communication CNRS Chimie