Le fonctionnement des batteries et supercondensateurs éclairé par des simulations de dynamique moléculaire

Résultats scientifiques

Comment relier la performance d’une cellule électrochimique (batterie ou supercondensateur) aux phénomènes microscopiques de transport des ions qui s’y déroulent ? Telle est la question à laquelle tentent de répondre des chimistes théoriciens à l’aide de simulations de dynamique moléculaire. Une étude menée au laboratoire Phenix en collaboration avec une équipe de l’université de Cambridge et publiée dans la revue PNAS.

Les dispositifs nano-électrochimiques sont des systèmes miniaturisés qui connaissent actuellement un fort développement pour le stockage de l’électricité et la détection d’espèces chimiques en solution. Comme les batteries et les supercondensateurs macroscopiques, la performance de ces nanosystèmes est caractérisée par l’impédance électrochimique. Cette grandeur permet de quantifier la réponse en courant électrique du système à l’application d’une tension alternative. Si l’impédance est une grandeur clé mesurable expérimentalement, son interprétation à l’échelle moléculaire en termes de transport des ions à travers l’électrolyte qui sépare les deux électrodes reste un grand défi. Et justement, les dispositifs nano-électrochimiques s’avèrent très utiles pour relier ces mesures d’impédance macroscopiques aux phénomènes microscopiques de transport des ions !

C’est ce que montrent des chimistes théoriciens du laboratoire Physicochimie des électrolytes et nanosystèmes interfaciaux (PHENIX, CNRS/Sorbonne Université) en collaboration avec une équipe de l’Université de Cambridge. Dans le cadre d’un projet financé par le Conseil européen de la recherche (ERC), ils ont utilisé des simulations de dynamique moléculaire* pour calculer l’impédance de nano-condensateurs constitués d’électrodes d’or séparées par de l’eau salée, en variant la concentration en sel ainsi que la distance entre les électrodes. Ils ont ainsi pu mettre en évidence le fort couplage entre le transport des ions et la polarisation du solvant (concrètement, ici, l’orientation des molécules d’eau) dans la réponse globale du système. Ils montrent aussi que l’impédance de ces nano-condensateurs peut s’écrire comme une somme de deux contributions : la capacité interfaciale, qui vient de l’accumulation des ions aux interfaces électrode/électrolyte, et la conductivité de l’électrolyte. Ces résultats justifient donc les modèles de circuit électrique équivalent très simples souvent utilisés pour interpréter les mesures expérimentales d’impédance électrochimique. L’équipe montre d’ailleurs comment extrapoler ces résultats à des condensateurs de plus grande taille sur lesquels sont généralement faites les mesures d’impédance.

Ce travail, publié dans la revue PNAS, suggère que les simulations de dynamique moléculaire pourraient être un outil puissant pour comprendre le fonctionnement et guider l’optimisation de systèmes électrochimiques variés.

* La dynamique moléculaire est une technique de modélisation qui permet de simuler l'évolution temporelle (dynamique) d'un système moléculaire.

Rédacteur : AVR

Référence

Impedance of nanocapacitors from molecular simulations to understand the dynamics of confined electrolytes
Giovanni Pireddu, Connie J. Fairchild, Samuel P. Niblett, Stephen J. Cox & Benjamin Rotenberg
PNAS 2024

https://doi.org/10.1073/pnas.2318157121

Nano-condensateur constitué d’un électrolyte aqueux confiné entre deux électrodes en or © G. Pireddu

Contact

Benjamin Rotenberg
Chercheur au laboratoire Physicochimie des électrolytes et nanosystèmes interfaciaux (CNRS/Sorbonne Université)
Communication CNRS Chimie