CNRS Chimie accueille Bert Meijer en tant qu’ambassadeur de sciences chimiques en France

Des polymères aux matériaux supramoléculaires, quel a été votre parcours de chercheur ?

Après avoir étudié la chimie organique à Groningen, avec un vif intérêt pour la stéréochimie, j'ai travaillé pendant 10 ans dans deux laboratoires industriels. C'est là que j'ai découvert la chimie des polymères et les matériaux fonctionnels, un domaine tout nouveau pour moi. Au début de ma carrière académique à Eindhoven, je me suis focalisé sur le rapprochement entre les petites et les grandes molécules. Ce domaine, que j'ai appelé la chimie macro-organique, utilise différents aspects de la chimie supramoléculaire. Cette thématique était déjà bien développée à l’époque, tout comme les interactions spécifiques entre les polymères. Mais l'idée de créer de nouveaux oligomères, de contrôler leur assemblage et leur chiralité, et de fabriquer des matériaux polymères grâce aux interactions directionnelles entre ces petites molécules était nouvelle. C’est ainsi que sont nés les polymères supramoléculaires. Plus généralement, l'idée d'utiliser toutes les interactions supramoléculaires possibles pour fabriquer des matériaux fonctionnels inspire encore notre groupe.

Quelles avancées majeures attendez-vous dans les 5 à 10 prochaines années pour les systèmes supramoléculaires fonctionnels ?

Bien que le concept des systèmes et matériaux supramoléculaires soit maintenant bien établi, je pense que nous ne sommes qu'au début de leurs applications. Par exemple, nos polymères supramoléculaires peuvent être utilisés comme biomatériaux adaptatifs pour l'ingénierie tissulaire ou comme matériaux faciles à traiter et recycler. Des propriétés optoélectroniques intéressantes peuvent également être obtenues dans des matériaux supramoléculaires fonctionnels. Un autre défit très intéressant est en train d’émerger : l'idée d'imiter le vivant. En effet, le vivant repose souvent sur un jeu complexe entre des millions de molécules reliées par des interactions supramoléculaires. Déchiffrer cette complexité moléculaire est l'un de mes rêves. Nous avons déjà de nombreux exemples de systèmes synthétiques qui se comportent de manière très similaire aux systèmes naturels. Nous espérons que le fossé entre ces deux mondes sera bientôt comblé.

Qu'attendez-vous le plus de votre tournée de conférences en France en tant qu'ambassadeur CNRS des Sciences Chimiques ?

Je me réjouis des nombreux échanges et discussions autour nos recherches dans les laboratoires que je visiterai. Mais surtout, j'ai hâte de rencontrer mes collègues et, en particulier, les nombreux étudiants, postdocs et jeunes chercheurs. Je suis très curieux de découvrir leurs recherches et espère que nous pourrons nous inspirer mutuellement pour rendre notre travail aussi utile et perspicace que possible. La responsabilité de la science face aux défis actuels de notre société est immense et nous devons tout faire pour trouver ensemble des solutions aux nombreux problèmes que nous rencontrons. Enfin, c'est un réel honneur pour moi d'être ambassadeur du CNRS dans un pays que j'admire tant et où je passe mes vacances depuis ma plus tendre enfance.