Caroline West au top de la chimie analytique
Maître de conférences à l’Institut de Chimie Organique et Analytique (ICOA, CNRS/Université d’Orléans) et membre junior de l’Institut universitaire de France, Caroline West a été nominée parmi les « 40 under 40 » de la revue The Analytical Scientist. Cette liste récompense les meilleurs chimistes analystes mondiaux de moins de quarante ans.
Que représente pour vous cette nomination dans la liste « 40 under 40 » de la revue The Analytical Scientist ?
Cette nouvelle est tout d’abord un honneur, mais aussi un challenge. Elle implique qu’on m’attende au tournant, je sais que ma production scientifique sera davantage regardée dans les prochains temps.
Cette revue publie une liste de ce genre chaque année, mais avec des thèmes qui changent. En 2014, j’avais ainsi déjà été citée dans leur précédent « 40 under 40 ». C’était important pour moi d’y être présente une seconde fois, de ne pas avoir failli !
Je ne prends en tout cas pas cette récompense comme une reconnaissance purement personnelle. Je reste très consciente du rôle de mes partenaires industriels, et des collègues et étudiants qui travaillent avec moi. À l’ICOA, je suis bien entourée et dispose des moyens nécessaires pour mener mes recherches.
Vous êtes spécialiste de la chromatographie, et en particulier de la chromatographie en phase supercritique. De quoi s’agit-il ?
La chromatographie sépare les molécules selon deux objectifs : une approche analytique qui cherche à identifier les produits, et une approche préparative qui les purifie avant un autre usage. La chromatographie en phase supercritique (SFC) utilise du dioxyde de carbone pressurisé et mélangé à un solvant. Cette méthode est plus polyvalente que les autres chromatographies, permet des séparations efficaces et rapides. Aspect également important pour moi, elle s’avère plus écologique car elle demande moins de solvants et fonctionne aussi avec de l’éthanol, plus vert que les habituels hexanes ou solvants chlorés.
Quelles sont vos principales contributions dans le domaine ?
Je développe depuis une douzaine d’années une classification des centaines de phases stationnaires disponibles pour la chromatographie supercritique, c’est-à-dire le support fixe sur lequel les composés sont entraînés et séparés par le CO2 pressurisé. La méthode peut en effet déconcerter les utilisateurs, puisque beaucoup de paramètres changent par rapport à des techniques plus courantes (chromatographie gazeuse ou liquide). Mais comme elle est très performante, j’essaye d’encourager les gens à l’employer.
Je ne fais pas que de la recherche fondamentale, je collabore depuis plusieurs années avec des laboratoires, comme Servier, pour implémenter mes travaux en contexte industriel. Les gains de temps qu’offre cette technique constituent un point crucial pour son usage industriel, en plus de son coût amoindri par sa faible consommation de solvants. J’ai aussi lancé des partenariats avec des fabricants de matériel de chromatographie pour chercher des solutions encore plus performantes et plus faciles d’utilisation.
Quelle est votre vision de la chimie ?
La chimie est partout autour de nous, en particulier la chimie analytique. J’aime savoir qu’on peut l’appliquer à absolument tous les domaines et centres d’intérêt. Lors d’une balade en forêt, la chimie est dans les odeurs ; si on est passionné par le sport, elle se retrouve dans la lutte contre le dopage, etc. C’est en tout cas ce que j’aime transmettre aux gens lors des évènements de vulgarisation scientifique.