Quand les électrons jouent au ping pong dans des molécules

Résultats scientifiques

Des scientifiques du Laboratoire des multimatériaux et interfaces (CNRS/Université Claude Bernard Lyon 1) ont élaboré des matériaux moléculaires à base de métaux et de radicaux où des électrons sont mis en mouvement dans un jeu de ping-pong métal-radical rythmé par des variations de température autour de -20°C. Ce va-et-vient provoque la commutation entre deux états magnétiques qui traduisent l’histoire thermique du matériau et lui confèrent ainsi un effet mémoire. En collaboration avec les Universités de Montréal et d’Hiroshima, ils ont montré qu’en appliquant une faible pression, ils pouvaient induire cette transition à température ambiante, rendant ces composés plus facilement utilisables pour des applications dans des dispositifs de mémoires ou des capteurs. Résultats à retrouver dans la revue Chemical Communications.

Les scientifiques du Laboratoire des multimatériaux et interfaces (CNRS/Université Claude Bernard Lyon 1) élaborent des matériaux moléculaires magnétiques dans lesquels des métaux et des radicaux* se lient pour former des réseaux bidimensionnels de type nids d’abeilles. Certains de ces systèmes peuvent basculer entre deux états magnétiques par une simple variation de température. En refroidissant, on rapproche les métaux et les radicaux ce qui déclenche le passage d’électrons libres des métaux vers les radicaux. Lorsqu’on réchauffe le matériau, les électrons effectuent le trajet inverse et on les retrouve sur les métaux. Sous l’effet du refroidissement ou réchauffage, on a donc un va-et-vient entre deux formes où les électrons libres à l’origine du magnétisme sont distribués différemment, caractérisées par des valeurs de l’aimantation différentes (état magnétiques différents). Compte-tenu du va-et-vient entre ces deux états magnétiques, ces composés sont dits commutables et possèdent un effet mémoire : ils se souviennent de leur état et du chemin emprunté, refroidissement ou chauffage, lors de la commutation. Un effet actuellement observé pour des températures voisines de -20°C qu’il serait intéressant de pouvoir obtenir à température ambiante si l’on veut envisager l’insertion de ces matériaux dans des dispositifs à effet mémoire.

Grâce à une collaboration avec les Universités de Montréal et d’Hiroshima, l’équipe de Lyon vient de montrer que la température de commutation des électrons entre les métaux et les radicaux libres pouvait être facilement modifiée par l’application d’une pression externe qui rapproche les métaux des radicaux. En appliquant une faible pression, ils ont réalisé le transfert d’électrons réversible à température ambiante, le matériau retrouvant ses propriétés magnétiques d’origine une fois décompressé.

Ces résultats, parus dans la revue Chemical Communications, montrent que l’on peut maintenant envisager l’insertion de ces composés dans des dispositifs de mémoire, des capteurs, des détecteurs ou encore des actionneurs.

* Un radical (souvent appelé radical libre) est une espèce chimique possédant un ou plusieurs électrons libre(s) (non appariés).

Rédacteur : CCdM

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© Dominique Luneau

Référence

Constance Lecourt, Yuuta Izumi, Kseniya Maryunina, Katsuya Inoue, Nicolas Bélanger-Desmarais, Christian Reber, Cédric Desroches & Dominique Luneau
Hypersensitive pressure-dependence of the conversion temperature of hysteretic valence tautomeric manganese–nitronyl nitroxide radical 2D-frameworks

Chemical Communications 2021

https://doi.org/10.1039/D0CC08144B

Contact

Dominique Luneau
Chercheur au Laboratoire des multimatériaux et interfaces (CNRS/Université Claude Bernard Lyon 1)
Stéphanie Younès
Responsable Communication - Institut de chimie du CNRS
Anne-Valérie Ruzette
Chargée scientifique pour la communication - Institut de chimie du CNRS
Christophe Cartier dit Moulin
Chercheur à l'Institut parisien de chimie moléculaire & Chargé de mission pour la communication scientifique de l'INC