Une lumière blanche pure et stable grâce à un dysprosium encapsulé

Résultats scientifiques

Les sources lumineuses blanches actuelles, comme les LEDs, ont tendance à osciller entre différentes variations de teintes, ce qui fausse la perception de l’œil humain. Cette limitation peut s’avérer très handicapante, voire dangereuse, lors d’opérations chirurgicales ou dans le travail des graphistes et des artistes. Des chercheurs du Centre de Biophysique Moléculaire d’Orléans (CBM, CNRS) et de l’Université du Michigan (États-Unis) ont développé un nouveau système, à base d’atomes de dysprosium et de métallacouronnes, qui donne une lumière exactement blanche et qui ne varie pas en fonction des conditions d’usure ou de température. Dans ces travaux, publiés dans le Journal of the American Chemical Society, le dysprosium a pu être inséré au centre d’une molécule en forme de couronne, qui renforce la stabilité de la lumière et permet de l’ajuster selon les besoins.

Dans les lampes actuelles et les différents systèmes d’éclairage, la lumière blanche provient généralement de la combinaison de différentes couleurs émises par plusieurs matériaux. Comme chacun d’entre eux comporte un risque de varier un peu, principalement à cause de l’usure ou de changements de température, il est ardu d’obtenir et de conserver un blanc parfaitement pur. Ce standard de blanc, défini en 1931 par la Commission Internationale de l’Éclairage (ou CIE), sert de référence sous laquelle l’œil humain perçoit les autres couleurs sans qu’elles ne soient faussées. Cela aide par exemple les chirurgiens à mieux utiliser leur expérience des couleurs pour reconnaître certains tissus, organes et anomalies. Si l’éclairage n’est pas toujours le même, leurs perceptions deviennent plus difficilement transposables d’une opération à l’autre car d’infimes nuances seront plus dures à reconnaître. Différents métiers artistiques, comme graphiste ou photographe, apprécient également les sources de lumière fiables. Les atomes de la famille des lanthanides sont d’excellents candidats pour ces applications, car leur structure électronique très stable les rend peu sensibles aux conditions extérieures. Des chercheurs du Centre de Biophysique Moléculaire d’Orléans (CBM, CNRS) et de l’Université du Michigan (États-Unis) ont utilisé un lanthanide, le dysprosium, pour obtenir une luminescence précise à partir d’un seul composé, qu’ils peuvent ajuster pour la rendre parfaitement blanche.

Pour atteindre ce but, chaque atome de dysprosium est inséré dans une metallacouronne, une imposante molécule extrêmement rigide. Enchâssé dans cette couronne protectrice, le dysprosium émet en simultané trois longueurs d’onde dans le domaine visible, dont la combinaison forme différentes teintes du blanc. Les chercheurs ont constaté, en étudiant les échantillons par analyse structurale monocristalline, que les changements de symétrie autour du dysprosium dans la metallacouronne modifiaient la couleur. Ils ont exploité ce phénomène pour identifier la configuration qui permet au dysprosium de générer un blanc parfait. Comme le dysprosium est la seule source de lumière, il y a moins de paramètres à contrôler pour conserver la même couleur que dans le cas où plusieurs matériaux sont employés en même temps. La formation de la metallacouronne désirée est elle-même relativement simple et reproductible, car une grande partie se met en place toute seule, par autoassemblage.

La couleur change selon la configuration de la metallacouronne. © Svetlana Eliseeva

Référence

Svetlana V. Eliseeva, Elvin V. Salerno, Beatriz A. Lopez Bermudez, Stephane Petoud and Vincent L. Pecoraro. Dy3+ White Light Emission Can Be Finely Controlled by Tuning the First Coordination Sphere of Ga3+/Dy3+ Metallacrown Complexes. J. Am. Chem. Soc. 2020.

 

https://doi.org/10.1021/jacs.0c07198

Contact

Stéphane Petoud
Chercheur au Centre de biophysique moléculaire d'Orléans (CNRS)
Svetlana V. Eliseeva
Chercheuse au Centre de biophysique moléculaire d'Orléans (CNRS)
Stéphanie Younès
Responsable Communication - Institut de chimie du CNRS
Anne-Valérie Ruzette
Chargée scientifique pour la communication - Institut de chimie du CNRS