Un matériau nanoporeux pour la purification du gaz naturel et de l’air à l'échelle industrielle ?

Résultats scientifiques Matériaux

Véritables éponges de l’infiniment petit, les matériaux nanoporeux permettent notamment de capturer sélectivement des molécules de gaz, vapeur ou de liquide, phénomène qui revêt un intérêt majeur dans de nombreux procédés industriels. Un consortium franco-coréen comprenant des chercheurs de l’Institut Charles Gerhardt Montpellier (CNRS/Université Montpellier/ENSCM), de l’Institut des matériaux poreux de Paris (CNRS/ENS/ESPCI) et du Laboratoire catalyse et spectrochimie (CNRS/Normandie Université/ENSICAEN) a identifié un matériau hybride poreux cristallisé qui, une fois déshydraté, s’avère capable de purifier le gaz naturel et l’air en fixant sélectivement l’azote gazeux en présence de méthane ou d’oxygène. Publiés dans la revue Nature Materials, ces travaux permettent d’envisager des procédés industriels plus efficaces de séparation de gaz.

La capture de dioxyde de carbone dans l’air ambiant, le stockage de l’hydrogène ou l’encapsulation de médicaments… Autant d’applications d’intérêt industriel majeur qui peuvent faire appel à des matériaux nanoporeux…. Ces matériaux peuvent en effet utiliser la grande surface déployée dans leurs cavités microscopiques pour capter d’importantes quantités de molécules sur des sites spécifiques.

Un consortium franco-coréen a identifié un matériau hybride poreux cristallisé, communément appelé Metal-Organic Framework (MOF), capable de fixer préférentiellement l'azote gazeux en présence de méthane ou d’oxygène. Ce sont des simulations moléculaires qui ont tout d’abord permis de guider le choix de la nature du métal pour la fixation sélective de l'azote. Le MOF ainsi façonné est constitué de petites unités métalliques de Cr(III) associées à des ligands carboxylates qui forment des réseaux de cages de grande dimension (plus de 20 Angströms). Les molécules gazeuses d’azote peuvent ainsi pénétrer à l’intérieur et se fixer sur les centres métalliques en restant stables. 

Des mesures d’adsorption réalisées sous flux ont ensuite démontré que ce solide présente des performances exceptionnelles pour l'adsorption sélective de l'azote en présence de méthane ou d'oxygène et des simulations moléculaires sont parvenues à en décrire l’origine en confirmant le rôle clef de l’interaction  entre l’azote et les atomes de Cr(III).

Ces résultats ont permis d'identifier pour la première fois un matériau facilement recyclable, capable de purifier le gaz naturel (notamment constitué majoritairement de méthane, mais en présence de concentrations élevées d'azote) sans utiliser les procédés couramment employés comme la cryogénie, le plus souvent énergivores. Aucun solide poreux n’avait permis à ce jour de réaliser ce type de séparation en piégeant les molécules d’azote par interactions avec les atomes du pore. Ce même matériau présente par ailleurs des performances encore meilleures que les adsorbants employés commercialement pour la purification de l’air avec une pureté accrue et des quantités d’azote adsorbées plus de deux fois supérieures. Ces travaux ouvrent de nouvelles perspectives à l’échelle industrielle pour la séparation de gaz.   

 

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Simulation numérique de la distribution des molécules d’azote et de méthane dans les cages du MOF

 

 

 

Référence

Ji Woong Yoon, Hyunju Chang, Seung-Joon Lee, Young Kyu Hwang, Do-Young Hong, Su-Kyung Lee, Ji Sun Lee, Seunghun Jang, Tae-Ung Yoon, Kijeong Kwac, Yousung Jung, Renjith S. Pillai, Florian Faucher, Alexandre Vimont, Marco Daturi, Gérard Férey, Christian Serre, Guillaume Maurin, Youn-Sang Bae & Jong-San Chang

Selective nitrogen capture by porous hybrid materials containing accessible transition metal ion sites

Nature Materials 19 Décembre 2016 
DOI: 10.1038/NMAT4825

 

Contact

Guillaume Maurin
Chercheur, Institut Charles Gerhardt (CNRS / Université de Montpellier)
Sophie Félix
Chargée de communication
Stéphanie Younès
Responsable Communication - Institut de chimie du CNRS
Christophe Cartier dit Moulin
Chercheur à l'Institut parisien de chimie moléculaire & Chargé de mission pour la communication scientifique de l'INC