Le CO2 à l’origine de la vie ?

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Une simple réaction entre le dioxyde de carbone (CO2) et divers métaux dans de l’eau salée donne une nouvelle piste pour comprendre l’origine de biomolécules – et donc de la vie – sur Terre. Cette réaction pourrait expliquer comment certains organismes primitifs créaient les molécules nécessaires à leur survie à partir de CO2 avant l’apparition des protéines. Cette découverte d’une équipe de l’Institut de sciences et d’ingénierie supramoléculaire (CNRS/Université de Strasbourg) est parue dans Nature Ecology & Evolution. Une petite révolution en chimie prébiotique.

Certains organismes fabriquent leur « matière première » biologique à partir de dioxyde de carbone (CO2). Ce CO2 leur permet de synthétiser de l’acétate à partir duquel ils forment des lipides, et du pyruvate qui est précurseur d’acides aminés, de sucres et par extension, d’ARN. Ils ont donc besoin de fixer le CO2 pour l’utiliser. Pour cela, ils recourent à un ensemble de réactions biochimiques appelé voie de Wood-Ljungdahl. Longtemps considérée comme la plus ancienne voie de fixation du carbone, cette voie nécessite des enzymes. Or, peu après l’apparition des océans sur Terre, ces enzymes n’existaient pas mais le CO2 et les métaux étaient abondants. Il serait donc pertinent, dans un scénario retraçant l’origine de la vie, d’identifier une voie de fixation du carbone sans enzyme qu’auraient pu utiliser des organismes primitifs. C’est ce que viennent de réaliser des chercheurs de l’Institut de sciences et d’ingénierie supramoléculaire (CNRS/Université de Strasbourg).

Inspirés par la nature, les chercheurs ont sélectionné les mêmes métaux que ceux présents naturellement dans les enzymes de la voie de Wood-Ljungdahl. En faisant réagir du fer, du nickel ou du cobalt avec du CO2 dans de l’eau salée, l’équipe a identifié des conditions pour la production sélective d’acétate et de pyruvate. Cette sélectivité analogue à celle des enzymes indique que ces dernières ne feraient qu’accélérer une réaction qui avait déjà lieu avant l’apparition de vie sur Terre.

Les conditions identifiées sont également compatibles avec les précédents travaux du groupe sur l’origine de la vie : les chercheurs avaient alors mis en évidence une manière d’exécuter sans enzyme une autre voie de la fixation du carbone. Ces nouveaux travaux renforcent donc l’hypothèse de l’origine spontanée de la vie sur Terre en proposant des conditions unifiant deux voies de la fixation non-enzymatique du carbone.

 

Image retirée.
La fixation du CO2 promue par le fer métallique (à gauche)
et la voie biologique promue par le H2 (à droite).

©Joseph Moran

 

 

 

Références

Sreejith J. Varma, Kamila B. Muchowska, Paul Chatelain et Joseph Moran
Native iron reduces CO2 to intermediates and end-products of the acetyl CoA pathway
Nature Ecology & Evolution – Avril 2018
Doi: 10.1038/s41559-018-0542-2

 

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Contact

Joseph Moran
Chercheur (ISIS UMR7006)
Sophie Félix
Chargée de communication
Stéphanie Younès
Responsable Communication - Institut de chimie du CNRS
Christophe Cartier dit Moulin
Chercheur à l'Institut parisien de chimie moléculaire & Chargé de mission pour la communication scientifique de l'INC