Graphène et nitrure de bore : des faux-jumeaux pour produire l’énergie bleue !

Résultats scientifiques Matériaux

Les nanomatériaux bidimensionnels à base de carbone (type graphène) ou de nitrure de bore, réputés pour être chimiquement inertes, montrent en fait une conductivité ionique exceptionnelle en milieu aqueux. À partir de simulations de dynamique moléculaire ab initio, des chercheurs du laboratoire PASTEUR (CNRS/ENS/SU) ont élucidé le mécanisme de chargement de ces matériaux qui leur confère ces propriétés exceptionnelles. Ces travaux sont parus dans la revue Nature Communications.

Les nanomatériaux bidimensionnels à base de carbone (type graphène) ou de nitrure de bore étaient réputés pour être chimiquement inertes. Mais l’émergence récente de la nanofluidique, où ils sont utilisés pour le dessalement de l’eau ou la production d’énergie bleue, a mis en évidence leur conductivité ionique exceptionnelle lors du transport des ions en milieu aqueux.

De récentes expériences de transport ionique ont également montré que la conductivité ionique mesurée pour le système eau/carbone (avec du graphène) est moins élevée et son évolution en fonction de la concentration en sel est différente que celle mesurée pour le système eau/nitrure de bore.

Des chercheurs du laboratoire PASTEUR (CNRS/ENS/SU) ont élucidé le mécanisme qui confère ces propriétés électriques exceptionnelles mais différentes au graphène et à son homologue. À partir de simulations de dynamique moléculaire ab initio, ils montrent qu’au cours du transport, les surfaces de ces matériaux se chargent considérablement via une adsorption d’ions hydroxyde OH-. Mais le mécanisme d’adsorption est radicalement différent : l’ion hydroxyde présente une faible physisorption1 à la surface du graphène mais une forte chimisorption2 à la surface du nitrure de bore. L’hydroxyde physisorbé sur le graphène conserve ainsi une excellente mobilité latérale par transfert de protons avec les molécules de la première couche d’eau voisine, ce qui explique son évolution particulière. Cette étude permet de démontrer la réactivité chimique de ces matériaux jusqu’alors négligée !

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Configurations stables de l’ion hydroxyde (bleu clair) : Proche d’une surface de nitrure de bore (chimisorption) et proche d’une surface de graphène (physisorption). © Marie-Laure Bocquet

Référence

Benoît Grosjean, Marie-Laure Bocquet, Rodolphe Vuilleumier
Versatile Electrification of Two-dimensional Nanomaterials in Water

Nature Communications - Avril 2019
DOI: 10.1038/s41467-019-09708-7

  • 1La physisorption met en jeu des liaisons faibles, du type forces de van der Waals, entre les espèces chimiques adsorbées et le substrat. Elle est fréquemment utilisée pour la séparation et la purification de gaz ou de liquides.
  • 2La chimisorption met en jeu des énergies de liaison importantes, du type liaisons covalentes, ioniques ou métalliques, entre les espèces adsorbées et le substrat.

Contact

Rodolphe Vuilleumier
Stéphanie Younès
Responsable Communication - Institut de chimie du CNRS
Sophie Félix
Chargée de communication
Christophe Cartier dit Moulin
Chercheur à l'Institut parisien de chimie moléculaire & Chargé de mission pour la communication scientifique de l'INC